Je n’ai pas dit quoi écrire et déjà à l’époque c’est la
question critique. Quoi écrire. Écrire, mais quoi. A l’école mes
rédactions sont sèches et vides. J’ai du vocabulaire, j’ai la
grammaire instinctive, mais les rédactions, franchement, non. Je me
souviens du sentiment, au moment d’écrire. A quoi bon. Qu’est-ce
qui mérite vraiment d’être raconté ?
Je
me rappelle un instant de satisfaction, quand même, en 6e.
Je ne raconte pas vraiment, je dis juste ce qui se passe avant. Je
dis ce qui se passe avant, et au moment où l’action va commencer,
je m’arrête. La rédaction est d’une longueur normale. Le
plaisir est là, pour moi, dans cet instant qui précède l’action.
La prof n’est pas de cet avis. Elle trouve que c’est frustrant.
C’est frustrant, en effet. Je ne sais pas encore que je suis en
train d’apprendre que la littérature, c’est une histoire de
frustration. C’est un rêve inaccessible. C’est une direction
indiquée, mais juste une direction.
Des
pages retrouvées du roman de 1975, seule la première vaut un peu
quelque chose. Il ne faudrait pas continuer. Alors j’accumule les
débuts. C’est de la science-fiction, parce que c’est surtout ce
que je lis à l’époque, mais ça n’a pas grand sens de dire ça.
Et même si j’apprends à écrire correctement – les notes au
collège me le confirment –, il n’y a pas de vrai progrès. Au
contraire. Je me rends compte, je me rends bien compte que c’est de plus
en plus mauvais. A l’époque je dis mauvais, mais il faudrait
plutôt dire sans intérêt. Faible. Notamment ce texte, un roman de
science-fiction encore, que j’ai commencé en 1977, vers le début
de 1977 je pense, et que je n’ai plus arrêté. Le plus mauvais de
tous, c’est celui que je n’ai pas voulu arrêter.
A
suivre, bien sûr.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire