mercredi 29 juin 2011

Gary des collèges

Un jour, par exemple, il était entré dans le block mimant l’attitude d’un homme qui donne le bras à une femme. Nous étions écroulés dans nos coins, sales, écœurés, désespérés, ceux qui n’étaient pas trop claqués geignaient, se plaignaient et blasphémaient à haute voix. Robert traversa la baraque, continuant à offrir le bras à la femme imaginaire, sous nos regards médusés, puis il fit le geste de l’inviter à s’asseoir sur son lit. Il y eut, malgré le marasme général, quelques manifestations d’intérêt. Les gars se soulevaient sur un coude et regardaient avec ahurissement Robert faire la cour à sa femme invisible. Tantôt il lui caressait le menton, tantôt il lui baisait la main, tantôt il lui murmurait quelque chose à l’oreille et il s’inclinait de temps en temps devant elle, avec une courtoisie d’ours ; à un moment, apercevant Janin, (…) qui se grattait les poils, il s’approcha de lui et lui jeta de force une couverture (…).
– Quoi ? piailla Janin. Qu’est-ce qui te prend ? J’ai plus le droit de me gratter ?
– Un peu de tenue, nom de nom, gueula Robert. Il y a une grande dame parmi nous.
– Hein ? Quoi ?
– T’es fou ?
– Quelle dame ?
– Naturellement, dit Robert, entre ses dents. Ça ne m’étonne pas… Y en a parmi vous qui font semblant de ne pas la voir, n’est-ce pas ? Ça leur permet de rester sales entre eux…
Personne ne dit rien. Il était peut-être devenu fou, mais il avait encore à ce moment-là des poings solides, devant lesquels les prisonniers de droit commun eux-mêmes se taisaient respectueusement. Il revint auprès de sa grande dame imaginaire et lui baisa tendrement la main. Puis il se tourna vers les copains complètement ahuris, qui le regardaient, la gueule ouverte :
– Bon. Alors, je vous préviens : à partir aujourd’hui, ça va changer. Pour commencer, vous allez cesser de pleurnicher. Vous allez essayer de vous conduire devant elle comme si vous étiez des hommes. Je dis bien « comme si » – c’est la seule chose qui compte. Vous allez me faire un sacré effort de propreté et de dignité, sans ça, je cogne. Elle ne tiendrait pas un jour dans cette atmosphère puante, et puis, nous sommes français, il faut se montrer galants et polis. Et le premier qui manque de respect, qui lâche un pet, par exemple, en sa présence, aura affaire à moi…
On le regardait, bouche bée, en silence. Puis quelques-uns commencèrent à comprendre. Il y eut quelques rires rauques, mais tous nous ressentions confusément qu’au point où nous en étions, s’il n’y avait pas une convention de dignité quelconque pour nous soutenir, si on ne s’accrochait pas à une fiction, à un mythe, il ne restait plus qu’à se laisser aller, à se soumettre à n’importe quoi et même à collaborer. A partir de ce moment-là, il se passa une chose vraiment extraordinaire : le moral du block K remonta soudain de plusieurs crans.
 
Romain Gary, Les Racines du ciel, Gallimard, 1954.
 
Tiens, c’était le texte du sujet du brevet des collèges (ou du DNB, comme on dit maintenant) – sur lequel ont planché mes élèves et mes collègues, tandis que moi, qui ne suis pourtant pas grand amateur de bière, je marinais dans l’odeur des pommes du sujet des séries professionnelle et technologique.


Commentaires

"Plancher sur Gary"? Je m'allonge tout de suite:)
Commentaire n°1 posté par Ambre le 29/06/2011 à 22h27
N'importe quel Gary ?


Réponse de PhA le 05/07/2011 à 19h32
Suite...
"« On entre dans la cave. Tout de suite, c’est ça qui vous prend. Les pommes sont là, disposées sur des claies – des cageots renversés. On n’y pensait pas. On n’avait aucune envie de se laisser submerger par un tel vague à l’âme. Mais rien à faire. L’odeur des pommes est une déferlante. Comment avait-on pu se passer si longtemps de cette enfance âcre et sucrée ? »"
Quel beau métier vous faites Philippe!
Commentaire n°2 posté par Ambre le 29/06/2011 à 22h30
Je me demande bien comment les élèves ont "reçu" ces textes. Un micro trottoir aurait été intéressant...
gballand
Commentaire n°3 posté par gballand le 30/06/2011 à 07h50
D'après un témoignage maison, ils les ont reçus avec le trac. Enfin, sûrement pas tous...
Réponse de PhA le 05/07/2011 à 20h20
Comment s'appelle le traducteur de Philippe Delerm ?
Commentaire n°4 posté par Dominique Hasselmann le 30/06/2011 à 15h04
Je sens que la question de Dominique Hasselmann comporte un piège... Lequel ?
Interdit de dire du mal de Gary, ou gare à Souricette !
Sinon, Philippe, ils sont tous partis en vacances?
Commentaire n°5 posté par Thaddée le 01/07/2011 à 22h18
Aujourd'hui, sûrement - mais c'est aussi que je suis en retard.
Réponse de PhA le 05/07/2011 à 20h21
Aucun tir envers Romain Gary, j'aime trop sa dégaine d'aviateur et non de pilier léger de bar.
Commentaire n°6 posté par Dominique Hasselmann le 01/07/2011 à 22h20

Réponse de PhA le 05/07/2011 à 20h24
Quelle formidable scène de film! J'y vois Charlot ou... Charlie Chaplin par exemple. 
 
Commentaire n°7 posté par Depluloin le 02/07/2011 à 16h52
Et à la réalisation ?
Réponse de PhA le 05/07/2011 à 20h27
oh que oui! magnifique passage. bon j'avoue qu'au collège j'en avais rien à foutre de Gary. je ne sais pas comment les collégiens ont accueilli le texte mais je doute qu'ils aient la maturité littéraire nécessaire pour l'apprécier à sa juste valeur.
 
ah oui et il y a une coquille dans l'extrait "cesser" et non "casser" de pleurnicher.
Commentaire n°8 posté par Matthieu le 05/07/2011 à 03h52
Merci !
Réponse de PhA le 05/07/2011 à 20h50
Mais quand j'avais 15 ans je me souviens que je n'étais pas la seule à avoir lu beaucoup de livres bien plus" difficiles" que Gary (que j'adore). Les collègiens d'aujourd'hui ne lisent plus Philippe?
Commentaire n°9 posté par Souricette le 05/07/2011 à 21h37
Les collégiens d'aujourd'hui sont vraiment pénibles : ils résistent de mieux en mieux à toutes les généralités. (Manière de dire que se cotoient quelques formidables lecteurs et d'autres qui lisent moins que rien - avec un peu de tout entre les deux. Le problème, c'est qu'ils ont tous le même programme !)
Réponse de PhA le 05/07/2011 à 21h44

lundi 27 juin 2011

les petits plaisirs de l’Education Nationale

Autrefois on vous proposait « fromage ou dessert ? »
Aujourd’hui on vous impose « surveillance et correction. »



Commentaires

Et restez correct, je vous surveille !
Commentaire n°1 posté par Moons le 28/06/2011 à 10h41
Interdiction de suer !
Réponse de PhA le 28/06/2011 à 15h37
Et c'est un menu, plus une carte...
Commentaire n°2 posté par Sophie K. le 28/06/2011 à 10h50
Ne critiquons pas : c'est très bon marché.
Réponse de PhA le 28/06/2011 à 15h38
et pré-harmonisation
et harmonisation
et commission de sujet
et oraux
et ... et bientôt il faudra donner un dixième de son traitement pour sauver la france de la faillite
et ! et encore ! je ne vous raconte pas tout !
Commentaire n°3 posté par aléna le 28/06/2011 à 11h58
Oh non, ne racontez pas. (Et tiens, quand même, il y avait une belle incohérence dans le sujet de rédaction - que j'espère sans gravité, on verra demain.)
Réponse de PhA le 28/06/2011 à 15h40
Des coups de pied au luc qui se perdent.
Commentaire n°4 posté par Denis Montebello le 28/06/2011 à 14h21
Il les vaut bien ! (Je sais, elle est facile...)
Réponse de PhA le 28/06/2011 à 15h42
Et de ruer, muer, huer et tuer.
Commentaire n°5 posté par Moons le 28/06/2011 à 15h42
On a juste le droit de louer.
Réponse de PhA le 28/06/2011 à 15h51
Et d'être chocolat, c'est la cerise sur le gâteau
Commentaire n°6 posté par Moons le 28/06/2011 à 15h58
Je n'aime pas trop les forêts noires - sauf celles de Romain.
Réponse de PhA le 28/06/2011 à 16h35
Tout est affaire de zones sensibles
Commentaire n°7 posté par Moons le 28/06/2011 à 16h42
Tu remarqué cette nouvelle étoile dans la Grande Ourse ?
Réponse de PhA le 28/06/2011 à 18h49
Heureusement avec quelques fuites bien organisées sur internet, l'année prochaine, il n'y aura plus rien à corriger!
Commentaire n°8 posté par Thaddée le 28/06/2011 à 21h37
Mais que fait le plombier !
Réponse de PhA le 29/06/2011 à 20h35
Chatel imprime, surprime, déprime. Lot real, that's life !
Commentaire n°9 posté par Dominique Hasselmann le 28/06/2011 à 22h00
Sûr qu'il va finir primé.
Réponse de PhA le 29/06/2011 à 20h37
Ah zut! je n'avais pas lu ce billet!
Pas si chouette le métier alors? (cf. commentaire Gary)
Commentaire n°10 posté par Ambre le 29/06/2011 à 22h32
Et encore, s'il n'y avait que cette sorte de petit désagrément. Mais bon, heureusement, il y a encore les élèves.
Réponse de PhA le 05/07/2011 à 20h18
 

jeudi 23 juin 2011

il est clair qu’aucun lecteur ne souhaite que j’invente encore quelque chose


« Christie, l’avertissais-je, il me paraît impossible de poursuivre ce roman. J’en suis désolé.
– Ne soyez pas désolé, dit Christie gentiment, ne soyez pas désolé. Nous n’en sommes point à confondre quantité et qualité, n’est-ce pas ? Et puis, qui veut encore lire de longs romans de toute façon ? Pourquoi passer tout son temps libre de la semaine à lire un roman de mille pages alors que l’on peut vivre en une seule fois une expérience esthétique comparable devant une pièce de théâtre ou un film ? L’écriture d’un long roman est en soi un acte anachronique : il se justifiait au sein d’une société et d’un ensemble de conditions sociales qui n’ont plus cours aujourd’hui.
– Je suis heureux que vous me compreniez si facilement, dis-je, soulagé.
– A partir de maintenant, le roman devrait seulement essayer d’être Drôle, Brut et Court, dit Christie en forme d’épigramme.
– Vous me l’enlevez de la bouche, repris-je, heureux. J’ai écrit tout ce que j’avais à dire, ou plus exactement, ce sera le cas dans vingt-deux pages, alors il est clair que…
– Alors, je continue encore un peu ? interrompit Christie ?
– Oui, Christie, tu continues jusqu’à la fin, le rassurai-je, puis terminai ma phrase : il est clair qu’aucun lecteur ne souhaite que j’invente encore quelque chose, il est clair qu’il ou elle n’aura aucun mal à extrapoler à partir des éléments déjà existants.
– S’il y a des lecteurs, dit Christie. La plupart des gens ne vont pas le lire.
 
 
Paru dans sa version originale en 1973, Christie Malry règle ses comptes est le dernier roman publié du vivant de B.S. Johnson, qui mettait fin à ses jours la même année.
 
Bien sûr je trahis l’intention principale en mettant ce passage en exergue : vous n’êtes pas supposés lire ce que je vous invite à lire. Ou peut-être que si.



Commentaires

Si.
Commentaire n°1 posté par Denis Montebello le 23/06/2011 à 21h22
Hélas.
Réponse de PhA le 23/06/2011 à 21h46
"Un long texte est un grand malheur". (Callimaque, ou quelque Grec tâtant de l'épigramme)
Commentaire n°2 posté par Denis Montebello le 23/06/2011 à 22h09
Le problème alors, c'est qu'un petit texte soit un petit malheur.
Réponse de PhA le 25/06/2011 à 18h55
"Extrapoler à partir des éléments existants" : on met le verbe avec un "z", ça fait un sujet du bac de philo.
Les éléments : "Nuit, extérieur jour".
Vous avez 4 heures, fouille à corps obligatoire pour récupérer tous les iPhone.
Commentaire n°3 posté par Dominique Hasselmann le 24/06/2011 à 10h52
Qu'est-ce que c'est, le bac ?
Réponse de PhA le 25/06/2011 à 18h56
Il me manque une Christie cruellement
Et le talent de B.S. Johnson évidemment.
Et sûrement autre chose. 
Commentaire n°4 posté par Depluloin le 24/06/2011 à 17h09
Il vous manque une Christie ? BSJ vous en offre un - plus dangereux encore.
Réponse de PhA le 25/06/2011 à 18h57
... inventer encore quelque chose... mais alors, le monde ne suffit plus, quoi ?...
Commentaire n°5 posté par Gilbert Pinna le 24/06/2011 à 17h13
Il faut croire. (Enfin, je ne sais pas - s'il faut croire.)
Réponse de PhA le 25/06/2011 à 18h59
@ Gilbert Pinna : que serait le monde sans son invention (comme peindrait Courbet) ?
Commentaire n°6 posté par Dominique Hasselmann le 24/06/2011 à 18h17
@Dominique Hasselmann :
...oui, condamnés que nous sommes à le ré-inventer.
Commentaire n°7 posté par Gilbert Pinna le 24/06/2011 à 19h45
@ Gilbert Pinna : Courbet, peintre originel.
Commentaire n°8 posté par Dominique Hasselmann le 24/06/2011 à 21h29
Christie Malry était quelqu'un de simple.
Commentaire n°9 posté par Thaddée le 25/06/2011 à 16h41
J'aime beaucoup sa simplicité.
Réponse de PhA le 25/06/2011 à 18h59

lundi 20 juin 2011

j’étends le linge en attendant

ce film en tant que poche d’air, dis-tu
cinématographiquement parlant s’épuise
à éluder son sujet – il faut le savoir
mais certains plans traversent la paroi
d’un ou de plusieurs films
 
j’étends le linge en attendant
 
David Lespiau, Djinn John, éditions de l’Attente, 2011, p. 19.
 





http://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/b/b8/Washing_Line%2C_Iceland.jpg

 

Commentaires

Jolie photo qui a un côté western, grands espaces, Il était une fois dans l'Ouest, avec des fantômes de cowboys accrochés par des pinces à linge.
Commentaire n°1 posté par Dominique Hasselmann le 20/06/2011 à 09h12
Oui, comme au cinéma, et puis on y voit des jeans de John ; dommage qu'ils ne soient pas jaunes. (Il y a des illustrateurs inspirés sur Wikipédia.)
Réponse de PhA le 20/06/2011 à 09h44
Ils sèchent plus vite que leurs ombres.
Commentaire n°2 posté par Gilbert Pinna le 20/06/2011 à 15h40
Gilbert, vous me dessinerez Lucky Luke en archi-duchesse.
Réponse de PhA le 22/06/2011 à 14h28
Curieux... cette étendoir,  je l'aurais placé un bon kilomètre plus loin. Ça fait une promenade...
Commentaire n°3 posté par Depluloin le 20/06/2011 à 16h36
Il y est peut-être.
Réponse de PhA le 22/06/2011 à 14h29
Pardon : Sept étendoirs...
Commentaire n°4 posté par Depluloin le 20/06/2011 à 19h01
Suivons votre panache blanc !
Réponse de PhA le 22/06/2011 à 14h29
L'est sec maintenant.
Commentaire n°5 posté par L..............................uC le 21/06/2011 à 17h37
Comme l'écrivain au travail.
Réponse de PhA le 22/06/2011 à 14h30
Badlands...et au bout du chemin les monts Appalaches que l'on n'atteint jamais. bises Philippe et bonnes vacances.
Commentaire n°6 posté par Cécile le 05/07/2011 à 13h49
Merci Cécile, bonnes vacances à toi aussi !
Réponse de PhA le 05/07/2011 à 19h19

jeudi 16 juin 2011

la condition misérable de l’écrivain

la condition misérable de l’écrivain

 

Peter Parker
(Cliquez pour agrandir.)
L-Araignee.JPG
C’est aux pages 71 et 77 du numéro 69 de Strange, le « Journal des super-héros », daté du 5 septembre 1975. Probablement l’un des tout derniers que j’ai achetés – pour trois francs cinquante : c’est l’époque où j’ai renoncé à une pourtant prometteuse carrière de dessinateur de bandes dessinées pour succomber, et définitivement cette fois, à la littérature.
On notera toutefois que certains thèmes cependant ont su persister jusqu’à aujourd’hui.



Commentaires

Peter ou Parker ?
Commentaire n°1 posté par Gilbert Pinna le 17/06/2011 à 10h46
Peter pour Gwendolyne, Parker pour Flash Thomson, l'Homme-Araignée pour moi, Spiderman pour mes fils.
Réponse de PhA le 18/06/2011 à 16h03
Le stylo Parker victime de la tablette... Mais que fait Waterman ?
Commentaire n°2 posté par Dominique Hasselmann le 17/06/2011 à 12h58
Et je ne sais même pas ce qu'il y a sur cette fichue tablette.
Réponse de PhA le 18/06/2011 à 16h01
Dingue, je m'en souviens aussi, de ce numéro. Moi itou, je voulais devenir dessinatrice de BD, en plus, à l'époque (j'avais 15 ans)...
Commentaire n°3 posté par Sophie K. le 18/06/2011 à 01h04
Vous aussi ! Moi j'avais douze ans, et j'hésitais entre poursuivre les trois comics que j'avais entrepris (sur le modèle de Strange) et mon premier roman, la fin du monde en 3005 (je n'étais pas pressé). (Finalement aujourd'hui c'est le fiston qui poursuit mon oeuvre, il a même repris certains personnages de son paternel - Johnny Romita aussi a eu un fils dessinateur, je crois.)
Réponse de PhA le 19/06/2011 à 00h56
Haha ! J'avais aussi des essais de BD en train, toutes plus ou moins SF évidemment (inspiration Pilote, Spirou et Tintin, de Valérian à Yoko Tsuno en passant par Lone Sloane)... De mon côté, c'était mon père qui voulait être dessinateur, et moi qui le suis devenue (théoriquement, car je dessine finalement moins que je n'écris). Amusant, la filiation, et la projection inconsciente des parents sur leurs enfants...
Le grand lecteur de Strange était mon frère, mais je les lui piquais après. :0)
Commentaire n°4 posté par Sophie K. le 19/06/2011 à 09h16
Je me disais bien aussi que Strange, tout de même, c'était surtout pour les petits gars.
Réponse de PhA le 19/06/2011 à 22h05
vous n'êtes pas mal en homme du commun maudit... mais j'avoue que votre cagoule rouge vous va à vermeille.
Commentaire n°5 posté par Aléna le 19/06/2011 à 13h26
Réponse de PhA le 19/06/2011 à 22h08

mardi 14 juin 2011

révolution

Il paraît que les éditions Gallimard, sises rue Sébastien Bottin, comme chacun sait, vont devenir les éditions Sébastien Bottin, sises rue Gaston Gallimard.
Cette nouvelle me bouleverse.


Commentaires

C'est le monde à l'envers! On marche sur la tête, que fait la police? 
Commentaire n°1 posté par Depluloin le 14/06/2011 à 17h20
Elle doit être coincée quelque part.

Réponse de PhA le 14/06/2011 à 21h39
Relativisons, tout de même : le n° de téléphone ne changera pas.
Commentaire n°2 posté par albin le 14/06/2011 à 18h15
Pour en être certain, faudra-t-il consulter le bottin ou le gallimard ?
Réponse de PhA le 14/06/2011 à 21h40
La Librairie Japonaise, sise rue des Pyramides, cherche nouvelle adresse.
Commentaire n°3 posté par Moons le 14/06/2011 à 18h27
Y aurait-il par ici un local pyramidal ?
Réponse de PhA le 14/06/2011 à 21h51
Je suis coite, mon frère
Commentaire n°4 posté par Moons le 14/06/2011 à 22h02
Le Seuil a bien abandonné celui de la rue Jacob pour un pied-à-terre à Montrouge : ce sont surtout les quelques habitants du lieu qui sont à plaindre, avec les changements d'adresse à aller faire à la Poste, les papiers à en-tête à refaire, etc.
Olivier Besancenot se gallimarre.
Commentaire n°5 posté par Dominique Hasselmann le 14/06/2011 à 22h44
Et pourtant même moi je n'étais pas insensible au charme de ce vieil immeuble et de son escalier de guingois qui donnait l'impression de monter au grenier.
Réponse de PhA le 16/06/2011 à 08h24
Oui, je suis au courant de cette histoire ! C'est incroyable ! Tout est possible aujourd'hui.
Et si nous échangions nos noms Philippe ? Nos vies en seraient peut-être bouleversées... J'essayerai d'écrire vos livres et vous de réaliser mes collages. Faudrait voir la réaction de Quidam...
Commentaire n°6 posté par Thaddée le 14/06/2011 à 23h34
Philippe ? Qui est-ce ?
Réponse de PhA le 17/06/2011 à 11h45
J'ai entendu dire que la rue du Commandant-Mouchotte, à Paris, près de Montparnasse, serait bientôt débaptisée au profit du nom (un honneur de son vivant) d'Etienne Mougeotte, directeur, notamment, du Figaro.
Il était temps que l'on rende à cet homme de micro, de caméra et de plume non serve l'hommage qu'il mérite.
Commentaire n°7 posté par Dominique Hasselmann le 16/06/2011 à 08h34
Cher Dominique, je conçois difficilement qu'une rue change de nom dans le Montparnasse monde sans que ce soit pour prendre le mien, et de mon vivant si possible, que j'en profite un peu...
Commentaire n°8 posté par ms le 16/06/2011 à 10h02
Mais votre nom est déjà disséminé à Montparnasse !
Réponse de PhA le 17/06/2011 à 11h48
Je  ne résiste pas au plaisir de voir mon nom figurer à sa place dans les fameuses listes du célèbre catalogue : Marsac.
Commentaire n°9 posté par David Marsac le 16/06/2011 à 11h01
Galli, c'est un joli prénom.
Réponse de PhA le 17/06/2011 à 11h51
Je me marre mais suis tombée à la renverse... en apprenant cette nouvelle... ici!
Commentaire n°10 posté par Ambre le 17/06/2011 à 23h00
C'est une nouvelle renversante, en effet !
Réponse de PhA le 19/06/2011 à 00
 

lundi 13 juin 2011

tu ne mourras pas - on n’oubliera pas

Moi qui me méfie des sujets je suis bien obligé de reconnaître que Tu ne mourras pas, ce roman de Bénédicte Heim que je viens de terminer dans son adaptation en BD par Edmond Baudoin, en a un. Et pas n’importe lequel, puisque je n’ose pas mettre de mots dessus. Bénédicte ose : c’est aussi qu’elle serait capable de danser sur des œufs. Là-dessus le dessin touché par la grâce de Baudoin, c’est ce qu’il fallait pour un album qu’on n’est pas prêt d’oublier. Cliquez plutôt – vous verrez (un peu) mieux.
 
Bénédicte Heim, Edmond Baudoin, Tu ne mourras pas, Les Contrebandiers éditeurs, 2011.
 
boudoin-heim-1.JPGbaudouin-heim-2.JPG 


Commentaires

(Les dessins de Baudoin portent, me semble-t-il, une tension graphique proche du travail de Crepax.)
Commentaire n°1 posté par Gilbert Pinna le 13/06/2011 à 19h14
Je ne connais pas bien Crepax. Autrefois, j'aurais été tenté de le rapprocher de Munoz ; et aujourd'hui - de Baudoin !
Réponse de PhA le 13/06/2011 à 22h14
pas mal!
Commentaire n°2 posté par Joelaindien le 15/06/2011 à 21h47
Et même mieux que ça !
Réponse de PhA le 17/06/2011 à 11h45

mercredi 8 juin 2011

regardez-le poncer

http://img.over-blog.com/414x600/2/76/85/46/images-4/Je-S-.JPG
Je ponce donc
 
La poncée me prit à l’occasion du rafraîchissement de mes volets, Ce devait être poncer pour peindre, ce fut poncer.
Du chêne épais de six centimètres. D’abord la lisse, poussière et patine, ensuite l’os. L’or pour la fin.
J’attaquai à l’abrasif grossier, à la toile émeri numéro 40. En un mois j’avais réduit les volets de moitié. Efficace mais facile ; je passai au 80. Au bout de trois mois il me fallut du 120. J’en usai cinq mois et sept du 240. Quand transparut le jour je finis au papier à lettres.
Dans l’élan j’en vins à mes poutres. Directement au papier à cigarettes. Deux ans de joie pour une charpente en allumettes.
Dorénavant je me passe d’outil, mon œil suffit. En quelques secondes je ponce mon prochain. J’use une montagne en douze ans. Enfin prêt pour le grand œuvre.
Je peux me regarder.
 
Denis Guillec, Je(S), Les Carnets du Dessert de Lune, 2011, p. 13
 
Le cerf de la couverture vous fait de l’œil ? C’est que comme moi vous avez dû le voir chez Gilbert Pinna, qui s’est ainsi retrouvé judicieux prescripteur loin de chez lui : c’est à Arras que j’ai trouvé ce petit (juste par l'épaisseur) livre singulier, au stand de ces éditions au nom programmatique. Il y a certaines couvertures qui valent la peine qu’on les soulève.


Commentaires

Oh, Philippe, la belle surprise que vous me/nous faites ! ... je transmets au cerf et à l'auteur.
Commentaire n°1 posté par Gilbert Pinna le 08/06/2011 à 18h00
Mais ce livre est déjà en soi une belle surprise.
Réponse de PhA le 08/06/2011 à 18h53
Bravo. Et Gilbert qui couvre une ponceuse éclectique. Bravo.
Commentaire n°2 posté par Dom A. le 08/06/2011 à 18h53
Une ponceuse qui fonctionne à l'éclecticité renouvelable, qui plus est.
Réponse de PhA le 08/06/2011 à 19h00
Merci de ce signalement poétique, Philippe. L'éditeur, en plus, est super top (malgré des reliures moyennement bien collées). Je ponce donc allez vite me frotter aux pages de cet auteur, dont les extraits proposés éveillent mes sens poétiques...
Commentaire n°3 posté par David Marsac le 09/06/2011 à 10h14
Il faut poncer, c'est essentiel. Moi-même, j'ai poncé bien des parquets. (Tiens, c'est joli ça, ça pourrait faire un début de roman : "J'ai poncé bien des parquets..." Et puis ça me rappelle cet autre beau ponceur.)
Réponse de PhA le 09/06/2011 à 13h48
Ponce Pierre, je m'appelle.
Commentaire n°4 posté par le petit cerf le 09/06/2011 à 16h54
Joli nom.
Réponse de PhA le 10/06/2011 à 22h58

dimanche 5 juin 2011

Marc Giai-Miniet à Nogent le Roi



Très belle exposition Marc Giai-Miniet, peintre et emboîteur, au Château de Nogent le Roi, en Eure-et-Loir ; c’est tous les week-ends (c’est-à-dire vendredi samedi dimanche lundi) jusqu’au 14 août, pour tous ceux qui n’ont pas encore trouvé leur sous-marin à la cave.

mercredi 1 juin 2011

Xavier Person arrange des rencontres aux abords des points d’eau

UNE ELLIPSE RAVIVE LE SOUVENIR DES SCÈNES ABSENTES
 
La répétition d’un rêve n’est pas exactement ce rêve, son récit est un rêve, te retrouver était ce que je recherchais dans cette phrase qui du coup s’élargissait à un autre rêve que mon rêve, mais plus près, d’un coup s’en rapprochant, je suis nu et je ne vois pas quoi te dire, comme si nous n’avions plus pour nous que la surface de nous-mêmes, nous faisons l’amour sans parfois terminer une phrase, sans toujours voir que cette phrase n’explique rien ou si peu, j’ai parlé trop tôt et trop vite et de notre élan cette phrase fait partie, elle est ce sur quoi, ce à partir de quoi les mots viennent, même si nous disons je t’aime des milliers de fois, même si, me disais-je, tout se défait dans une lueur où je pourrais vouloir crier, même si je ne reviendrai jamais en arrière, c’est promis, dans aucune phrase, maintenant que tout s’accélère que je reconnais ce rythme, ce ton, je ne peux pas dire le contraire, je ne peux pas te dire comment je me suis endormi dans cette phrase, elle dure encore, dans à peu près toutes les phrases.
 
  
UN BLANC SI LONG QUE L’EFFET DE RÉEL A ETE MODIFIÉ
 
Une photographie aérienne
n’ensevelit pas tout
considère l’envol d’un héron
question posée pour rien
une seconde négation cherchait à retourner la première sur elle-même
on ne sautait pas, ne sachant pas d’où on aurait pu sauter
on arrachait tout
dans trop de lumière et plus d’yeux
une tache noire ne dure pas si longtemps
une forme imprévisible cherchait à sauver quoi
une fois tel ou tel mot supprimé
je cherchais, me disais-je, à remonter jusqu’au point de départ de la sensation d’un amour.
 
Xavier Person, Extravague, Le Bleu du Ciel, 2009, pages 46 et 47.
 
 
Ça me rappelle la première fois où j’ai vu un ptérodactyle. Je devrais plutôt dire la seule fois. Et puis je devrais dire « la fois où j’ai entendu un ptérodactyle », car c’est en l’entendant que je l’ai reconnu. C’est pour ça aussi, dans l’espoir d’en revoir un, que je retourne de temps en temps à la Bonne Mare. J’étais seul bien sûr, on a peu de chance de voir des ptérodactyles quand on se promène en compagnie, et en débouchant sur la Bonne Mare (on ne peut que déboucher sur la Bonne Mare, à vingt mètres elle est encore insoupçonnable), j’ai entendu, j’ai vu le héron s’envoler de son vol lourd, son envergure était telle que pour éviter les arbres il était obligé d’aller en cercle au-dessus de la mare, quand il a crié son cri est venu de très loin : c’est là que j’ai reconnu le ptérodactyle. C’est son point de vue de la Bonne Mare qui illustre ce billet.
Je ne dois pas m’étonner que Xavier Person arrange des rencontres aux abords des points d’eau, me confirme Didier da.
Sur Extravague, il y a aussi ce bel article de Marc Villemain paru dans le Magazine des Livres.