Quant aux « classiques »,
comme on appelle un peu vite ces livres dont le succès semble résister au
temps, il n’y a plus guère que dans les classes qu’on les lit encore, à en
croire les éditeurs – c’est ce que je me dis en sortant d’un Thérèse Raquin
chez Le Livre de Poche, collection Les Classiques de Poche (c’est écrit dessus) ;
édition que je ne conseillerai pas au lecteur qui, n’ayant pas encore lu Thérèse
Raquin, serait tenté de l’y découvrir. Les notes y sont nombreuses, on vous
y explique par exemple le sens d’« impudence » ou d’« implacable ».
Bon. Mais faut-il vraiment que, sous prétexte que l’édition s’adresse à des
élèves (ce qu’elle pouvait faire en l’annonçant plus clairement en couverture),
faut-il absolument priver ces jeunes gens du plaisir de découvrir l’histoire
par eux-mêmes ? Les deux événements majeurs du récit (disons : le
dénouement de la première moitié et le dénouement final) sont carrément
annoncés, sans la moindre précaution, dans les notes. Histoire de bien rappeler
à nos jeunes lecteurs que s’ils lisent, c’est parce que l’école les y oblige ;
pas du tout parce qu’ils pourraient trouver, pourquoi pas, du plaisir à cette
lecture. Spoiler, comme on dit aujourd’hui. Gâcheur, en français, c’est
parlant aussi. En revanche, alors que tout du long de Thérèse Raquin
court la métaphore obsessionnelle de l’enterré vivant – c’est tout le drame de
Thérèse –, même lorsque, concernant un autre personnage, on tombe sur cette
phrase :
« Ses sensations ressemblaient
à celles d’un homme tombé en léthargie qu’on enterrerait et qui, bâillonné par
les liens de sa chair, entendrait sur sa tête le bruit sourd des pelletées de
sable. »
jamais n’est fait le rapprochement
avec la Mort d’Olivier Bécaille, cette nouvelle de Zola où l’enterré
vivant n’est pas là simplement à titre métaphorique. Et pourtant, pour rester
en pédagogie de la littérature, c’est une nouvelle très accessible au jeune
élève qui serait curieux de prolonger sa découverte de Zola.
Allez, une petite image de Walking
Dead en illustration parce que les amateurs de cette série savent
particulièrement bien ce que Spoiler veut dire et que des morts qui
marchent c’est un peu la même chose que des enterrés vivants, sauf que c’est
exactement le contraire – quoi.
Gâchage, sabotage, oui. Pour moi, ce fut trahison lorsque je dus apprendre par coeur, il y a longtemps, "Les Effarés", qui avaient non pas pas "leurs culs en rond" mais "leurs dos en rond"....
RépondreSupprimerAh, les éditions censurées... Il faudrait voir si ça existe encore, je ne jurerais pas du contraire.
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