lundi 30 juin 2014

Mon jeune grand-père (45)

  Le 23 juin 1917. Mes chers parents.
L’espace entre l’en-tête et la première ligne est inhabituellement plus large que les interlignes qui suivent.
Pendant quelques jours nous avons eu ici de très fortes chaleurs, c’était presque insupportable on ne pouvait rien faire sans être tout de suite en sueur. Il y avait près de 40° au soleil. Mais hier nous avons eu un peu de pluie et aujourd’hui le temps est un peu rafraîchi. C’est assez heureux pour nous. Surtout que j’avais tout le temps soif et que je buvais beaucoup, ce qui ne pouvait que faire du mal à mon estomac. Je crois que c’est la première fois qu’il parle de son estomac. C’est vrai qu’il y a une partie des cartes qui ont été mélangées et que j’ai laissé ce désordre. Je crois aussi que c’est ce quelque chose à l’estomac qui l’a tué, onze ans plus tard. Quelque chose qu’il aurait contracté durant sa captivité. Comme courrier j’ai reçu les cartes de papa des 2-4-5-6-7-8 ainsi qu’une carte de Thérèse Déqueuse (si je lis bien) de Suisse. Comme colis, j’ai reçu les colis gare n° 15-16-18. Tout était en bon état sauf le beurre qui avait fondu et qui était diminué d’une assez forte quantité. Il faudrait le mettre en boîtes comme celles de viande de cette façon il ne fonderait (sic) pas et n’abîmerait pas le reste du colis. Je n’ai rien reçu de Lucie depuis un mois et ne savais qu’elle avait fait ce voyage et changé de situation. Ma sœur est bien gentille de me confectionner des douceurs et je l’en remercie mais je croyais qu’elle devait m’écrire une longue lettre, je ne vois rien venir. J’ai oublié dans ma dernière carte de vous demander une ceinture en cuir ou en caoutchouc pas très haute pour mettre pour jouer au tennis à la place des bretelles. Je vous rappelle qu’il serait temps si vous ne l’avez pas fait de m’envoyer du savon, pâte dentifrice, et lacets. J’espère que (mot raturé) ma dernière carte vous sera bien arrivée et que vous aurez tout pigé. C’est vrai qu’il ne parle pas de son camarade Gauduchon. Un espace après cet inhabituel « pigé », concession à l’âge ; la formule finale fait une nouvelle fois l’objet d’un paragraphe séparé.
Je vous quitte mes chers parents en vous embrassant bien fort tous les deux ainsi que Geneviève et Louis et toute la famille. Votre fils qui vous aime. EA

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