samedi 2 mars 2013

Mon jeune grand-père (2)

 
Annocque Edmond
Sous-lieutenant
 
Mon jeune grand-père.
 
Stübe 79
Offiziergefangenenlager
Reiden in Posen
 
Je ne suis pas sûr de bien lire.

L’essentiel est au dos.

D’abord on est rebuté : c’est écrit tout petit, tout serré ; il n’y a pas de paragraphe et c’est clairement la surface du carton et la taille de l’écriture qui détermine la longueur du texte.
 
Le 12 août 1916. Mon cher Papa,
J’ai reçu tes cartes des 31 et du 1er ainsi que la lettre de maman du 30. J’ai reçu également une lettre de ma Tante Maria du 1er. J’ai été heureux d’apprendre qu’elle allait toujours bien et qu’elle ne s’ennuyait pas trop. Elle est allée deux fois chez Marie-Louise qui est également en bonne santé ainsi que sa famille. Comme colis j’ai reçu le 10 le colis n° 27 et aujourd’hui un colis de pain. Mais je n’ai pas reçu le 26. Nous deux Daussy, nous sommes en ce moment dans la mouise, nous n’avons plus de conserves, ni cacao ni sucre. Heureusement qu’on nous a augmenté la ration de pommes de terre, alors on se rabat sur les légumes. D’après ce que tu m’écris tu n’as pas dû recevoir ma carte du 6. J’espère qu’il n’en sera pas de même pour celle où je demande ma tenue. J’ai hâte de la voir arriver car je suis sale et ma culotte commence à être usée jusqu’à la trame. A ce sujet je crois qu’il me faudra une autre culotte pour ne pas user trop vite celle de mon complet. Mais une culotte c’est embêtant : il faut mettre des guêtres ou des bandes. J’aimerais mieux un pantalon et comme je trouve qu’un pantalon bleu horizon ce n’est pas beau, je te demande de m’en faire faire un rouge. Fais-moi faire quelque chose de pas trop cher assez solide et pour l’hiver. J’attends aussi avec impatience les bouquins que je t’ai demandés. Dire que j’aurais déjà tout cela si ma lettre de Mayence ne s’était pas perdue. Je ne sais si je t’ai dit que je m’étais abonné à la Gazette des Ardennes. Cela me permet d’avoir un peu des nouvelles de notre région. Je suis abonné à un journal allemand ce qui me permet de lire les communiqués. Je les traduis et cela me fait passer un peu de temps et m’apprend en même temps des mots. Dis à maman que je n’oublie pas que c’est mardi le 15 août. Je pense bien à vous, ainsi qu’à toute la famille ; mais je pense surtout à ma chère maman qui doit bien s’ennuyer toute seule. Je te quitte mon cher Papa en t’embrassant bien fort ainsi que ma chère Maman et toute la famille. Mon meilleur souvenir à tous les amis. Une caresse à bibi. Ton fils qui t’aime de tout son cœur. Edmond.
 
Je ne sais pas qui est la tante Maria. Une tante Marie ça me dit bien vaguement quelque chose mais là je crois bien lire Maria. Je ne sais pas non plus qui est Marie-Louise. Ma tante s’appelait Marie-Louise mais on ne l’a jamais appelée Marie-Louise. Mais ma tante n’était pas née en 1916.

En 1916 mon grand-père était prisonnier de guerre il n’était pas marié il n’avait pas d’enfant.

Quand il a eu une fille il l’a appelée Marie-Louise. Ou bien c’est ma grand-mère qui l’a appelée Marie-Louise, on ne peut pas savoir. Ensuite il a eu un fils qui plus tard est devenu mon père. Ensuite il est mort.

 Apparemment il avait chopé quelque chose pendant qu’il était en camp de prisonniers dont il n’a jamais guéri. Ça avait rapport avec l’alimentation.

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