Ouf ! Je suis un auteur exclusivement du XXIe siècle – mais à quelques mois près seulement, je l’ai échappé belle. En effet
mon Affaire de regard, indisponible depuis quelque temps déjà mais parue en août 2001 n’est pas (encore) concernée par le projet ReLire (Registre des Livres Indisponibles en Réédition Électronique), et je m’en félicite.
Voici le topo :
« ReLIRE
vous donne accès à une première liste de 60000 livres indisponibles du
XXe siècle : des livres sous droits d’auteur, publiés en France avant le
1er janvier 2001, et qui ne sont plus commercialisés.
Si les titulaires de droits ne s’y opposent pas, ces livres entreront en gestion collective en septembre 2013. Ils pourront
alors être remis en vente sous forme numérique. »
Vu comme ça, du point de vue du lecteur (« vous »), ça a l’air plutôt pas mal. On se dit que chouette, on va pouvoir
avoir accès à quelques introuvables.
Mais
comme je ne suis pas que lecteur, je dois dire que le deuxième
paragraphe me chatouille désagréablement. « Si les
titulaires de droits ne s’y opposent pas ». Si je comprends bien,
c’est à l’auteur (ou à l’ayant droit) de se manifester, sinon, on fait
ce qu’on veut de son œuvre sans lui demander son
avis. C’est bien ça ? Non, j’ai dû mal comprendre. Attendez, je
clique sur « Vous êtes auteur », on va sûrement me
rassurer.
« Que faire si l’un de vos livres, publié au XXe siècle, se trouve dans cette liste ?
Si
vous souhaitez que vos livres entrent en gestion collective, vous
n’avez aucune démarche à accomplir. En ne vous opposant
pas, vous acceptez qu’une société de gestion collective exerce en
votre nom les droits numériques sur le livre : elle pourra accorder des
autorisations d’exploitation numérique du livre et
vous versera une rémunération si le livre est exploité.
Vous pouvez remplir un formulaire en ligne sur le site dédié de la société de gestion
collective pour vous faire connaître.
Si vous ne souhaitez pas que vos livres entrent en gestion collective, vous pouvez vous y opposer selon les modalités précisées
ci-dessous. »
Ah non, on ne me rassure pas. On me prévient juste que si je ne fais rien, mon livre va être de nouveau publié, par je ne sais
qui, je ne sais comment, selon les termes d’un contrat que je n’ai pas signé.
Je
n’ai pas à me plaindre, remarquez : j’ai le droit de ne pas être
d’accord – mais juste pendant six mois ; après,
c’est trop tard. Sauf que bien entendu l’information passant comme
elle passe, il y a fort à parier qu’elle échappera à bien des auteurs et
encore plus d’ayant droit.
Non, si je n’ai pas à me plaindre, c’est parce qu’Une affaire de regard
a été publié en 2001. Mais je me sens très concerné quand même, parce
que la question
de son éventuelle réédition me titille. Quand le livre a été épuisé,
je trouvais que ce n’était pas plus mal au fond que le Seuil renonce à
ses droits, malgré le relatif succès (au moins
critique) que le livre avait connu. J’avais quelques réserves sur le
texte et sur les conditions de son écriture – sur d’ailleurs lesquelles
j’aimerais revenir un jour. Et puis trois lecteurs
auxquels je fais confiance m’ont assuré que mes réserves étaient
excessives, voire infondées. Allez, foin de la discrétion, je les nomme
dans l’espoir fou de leur attirer quelques lecteurs de
plus ; deux d’entre eux sont de sacrés beaux écrivains : Gabriel
Bergounioux et Didier da Silva – quant au troisième, c’est Quidam. Et
c’est chez Quidam bien sûr que le livre serait
déjà ressorti en poche, un rien corrigé, si les soucis que l’on sait
n’avaient retardé ce projet.
Bref, j’entends faire ce que je veux de mes textes. Je veux choisir mes éditeurs, comme eux-mêmes me choisissent.
Relire, d’accord. Mais pas sans l’accord de l’auteur, merci.
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