Ainsi,
on pressent déjà que Johnson va se heurter de plein fouet, pas tant à
l’establishment littéraire (qui, tout au long de sa
carrière, lui témoigna au moins un certain respect, quoique
réticent), qu’à la branche commerciale du monde de l’édition. Cela
aurait pu n’avoir aucune importance s’il s’était contenté (comme
Samuel Beckett, par exemple) d’accepter que ses ouvrages soient
publiés par de petites maisons d’édition indépendantes, sans se
préoccuper des chiffres de vente, mais sa détermination à ne jamais
transiger sur sa vision artistique allait de pair avec sa conviction
que son travail méritait également de toucher un large public, et si
tel n’était pas le cas, c’était entièrement dû à
l’incompétence de ses éditeurs. Rétrospectivement, il semble évident
qu’il allait être difficile de concilier ces deux exigences.
Jonathan Coe, B.S. Johnson, Histoire d’un éléphant fougueux, Quidam éditeur, 2010, p. 156.
Ça se lit comme un roman,
dit-on parfois de certaines bonnes biographies. C’est pour ça que – un
instant, je déglutis –
c’est pour ça que j’ai du mal à ne pas m’identifier au personnage ?
(Vous avez raison : je suis plus mince que Johnson – mais moins que
Beckett.)
Commentaires
Enfin, Minuit n'est pas une petite maison !
Commentaire n°1
posté par
Dominique Boudou
le 05/09/2011 à 09h29
Aujourd'hui, bien sûr ; mais quand les premiers romans de Beckett
sont arrivés dans les mains de Jérôme Lindon, c'était une petite maison.
A cet égard l'histoire de Minuit est emblématique, et je
ne crois pas du tout qu'elle puisse se reproduire aujourd'hui
(qu'une petite maison indépendante puisse devenir un grand éditeur en se
consacrant à la littérature de qualité). (Et bien sûr Coe ne
pense pas seulement à Minuit mais aussi aux premiers éditeurs
anglais de Beckett.)
Réponse de
PhA
le 05/09/2011 à 13h47
Tu as raison, j'ai oublié de resituer Minuit dans son contexte des années50. Bonne rentrée scolaire.
Commentaire n°2
posté par
Dominique Boudou
le 05/09/2011 à 13h53
Je suis bien sûr très mal placé pour le dire, mais je le dis quand
même : Quidam mériterait un sort comparable à celui de Minuit. Tiens, le
premier roman de ton voisin Decourchelle, par exemple ;
une authentique merveille, il fallait le dénicher. Mais l'aventure
de Minuit était déjà très improbable à l'époque, et aujourd'hui c'est
cuit (d'ailleurs je me demande si Lindon lui-même ne l'a
pas dit, ça). Bonne rentrée quand même !
Réponse de
PhA
le 05/09/2011 à 14h25