Une
carafe contient un texte de Stendhal à la couleur jaune-marron.
Cette page a une tête, l’ensemble évoque une poupée russe en bois.
Stendhal l’écrivit dans les années 1825-1828 (?). L’autographe
appartient à une jeune fille, fine exégète. Unissant la nature et
la culture, le passé et le présent, le petit texte semble déplorer
l’incapacité d’écrire un roman qui aurait le succès de ceux
que Balzac publiera de 1830 à 1850. Stendhal survenu – sans la
physionomie que nous lui connaissons (il ressemble à son style, non à
lui-même) – réfute ma lecture : il aime mieux écrire
cette page qu’un roman balzacien, il sera toujours temps de produire
La Chartreuse de Parme (10 ans plus tard). Je transvase la
page dans une autre carafe, en verre, où elle apparaît
jaune ananas. Pendant les transvasements, la substance se perd. La
jeune fille à laquelle je déclare qu’aujourd’hui les stendhaliens sont
presque tous des jeunes filles, attirées par cette
algèbre particulière, voudrait vendre le document dans une
brocante.
Hubert Lucot, Allégement, POL, 2009, p. 81-82
Je lis le dernier livre d’Hubert Lucot.
Pour mon plaisir, j’isole le passage ci-dessus, n’en dis pas un mot.
« … le Neuf-Trois encore communiste et de loubards, où
l’architecture sociale fait songer à la banlieue de Prague ou de
Varsovie communistes… » (p. 67)
Mon œil de touriste s’était fait la réflexion strictement
réciproque, ça me revient, en traversant la banlieue de Prague : ça
ressemble à la Seine-Saint-Denis – qu’on n’appelait pas encore
« Neuf-Trois » – où j’habitais et où je travaillais alors.
C’est toujours chez Lucot ce va-et-vient entre la sphère privée,
intime même, et la sphère publique. En lisant les pages qui évoquent
Sarkozy (j’hésite encore sur l’orthographe) je suis moins
dedans, je sais pourquoi. Je me dis que c’est un mauvais sujet, en
sachant bien qu’il n’y a pas de mauvais sujets, sauf aux yeux du roi.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire