samedi 21 mars 2020

Écrire et publier ou pas (28) (2006)


Rapidement, la fin de l’aventure Melville. La publication de Chroniques imaginaires de la mort vive, juste un an avant, ça reste un bon souvenir. Celle de Par temps clair, non. Déjà, la correction des épreuves est très pénible. Ça n’est jamais une partie de plaisir mais jusque-là (et par la suite non plus) ça ne m’avait jamais fait cet effet-là. Le texte fait l’objet d’un dégraissage systématique dont je ne vois pas bien le sens. Dégraisser, c’est souvent utile ; mais Par temps clair, je le vois comme une sorte de cancer de la pensée – je renvoie ses rares lecteurs à l’explicit (les deux mots de la fin), particulièrement explicite à cet égard. Alors pourquoi dégraisser à ce point ? Le vocabulaire de la biologie, délibérément amplifié, y est aussi bien réduit. Cela dit le texte n’est pas non plus dénaturé et il faudrait que je relise les deux versions pour vérifier laquelle est la meilleure, je n’en sais rien. Ce que je sens, c’est que la communication avec Séverine Weiss, très bonne l’année précédente, est devenue difficile. Le livre paraît en mai, ce qui n’est pas la meilleure période. Pas de réunion avec les représentants comme pour Chroniques. Aucune réaction, ni de la presse, ni des libraires. C’est comme si le livre n’avait pas été publié – sauf qu’il l’est, donc c’est pire : il aurait mieux valu qu’il ne le soit pas. A l’automne, un petit mot très bref de Séverine m’annonce son départ de Melville. Je devine que ça a dû être très compliqué pour elle, je regrette un peu qu’elle ne m’en ait pas dit un peu plus, ça aurait dissipé mon brouillard ; je ne lui en tiens pas rigueur non plus, tout ça n’a rien d’évident, surtout quand l’éditeur est salarié et qu’il a des comptes à rendre, sans parler de tout ce que je ne sais pas puisque je ne le sais pas – en l’occurrence à l’époque déjà le grand patron ne m’inspire aucune confiance. Par temps clair reste donc un livre publié mais sans existence. Sans la lecture d’un autre patron (Claude Cherki), il serait paru au Seuil, en 2002 ou 2003. Mais alors je n’aurais pas écrit Chroniques, j’en suis sûr, qui a été écrit notamment pour arracher l’étiquette. Et j’aurais sans doute été plus contraint dans mon écriture, par la suite, pour rester au Seuil. Plus contraint encore. On est toujours contraint, mais au moins on a le choix des contraintes.
Chez Léo Scheer par la suite, quand par acquit de conscience je proposerai Liquide, c’est comme si on ne savait pas qui j’étais.
A la date du 21 octobre, je lis dans mon vieux carnet vert (à la suite de l’annonce du départ de Séverine) : « Réaction habituelle : écrire plus. » Et le 10 décembre je finis le premier jet d’un livre que vous lirez peut-être un jour – celui qui depuis un certain temps déjà ne s’appelle plus Premier roman.


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