dimanche 8 mars 2020

Écrire et publier ou pas (24) (été / automne 2004)


Les refus de Corti et de Verdier m’ont redonné du courage. Je trouverai un éditeur pour Chroniques imaginaires de la mort vive, j’en suis sûr. Je décide de joindre ces refus à mes prochains envois. C’est une drôle d’idée, ça peut avoir l’effet contraire à celui désiré, mais pas forcément. Un éditeur peut aimer un texte et se trouver mal placé pour le publier, son avis peut intéresser quelqu’un d’autre. Et que faire de ces refus ? Si Bobillier s’est donné le mal de m’écrire cette lettre (citée dans l’épisode précédent), ce n’est pas juste pour me prouver qu’il a lu mon texte, c’est pour que j’en fasse quelque chose. Je crois de plus en plus en la solidarité chez les gens qui aiment vraiment la littérature.
Pendant l’été, un nouveau projet prend forme dans mon esprit. A partir de textes jusque-là éparpillés de manière incohérente (ou rassemblés de manière trop peu cohérentes dans Affleurements), je conçois une première version de mes Mémoires des failles. Le titre apparaît pour la première fois. C’est à mes yeux un de mes textes les plus importants, mais je me rends bien compte que ce ne sera pas le plus facile à publier (de fait il ne le sera qu’une bonne dizaine d’années plus tard grâce aux éditions de l’Attente, qui ne savent pas à quel point elles sont bien nommées concernant ce livre).
Dès septembre, je reçois un coup de téléphone de Sabine Wespieser. Elle n’en est pas encore à décider la publication de Chroniques imaginaires de la mort vive, mais elle souhaite me rencontrer pour en parler. Je me rends compte que décider de me publier n’est vraiment pas une décision facile. Car c’est l’auteur entier qui l’intéresse – ou pas. C’est le cas pour la plupart des éditeurs. A propos de Chroniques, elle trouve que la fin manque trop de clarté. A la relecture, elle a raison, indiscutablement. Il y a beaucoup de non-dit dans ce récit, c’est là-dessus qu’il fonctionne, mais je me rends compte que j’en ai abusé à la fin. Je réécris la fin. Un mois a passé. Elle trouve la nouvelle fin meilleure, mais réserve encore sa réponse ; elle attend un texte « plus costaud » (plus long, peut-être ? Chroniques est un livre court). Je lui envoie Par temps clair mais l’espoir est passé. Au même moment, Frédéric Joly prend contact avec moi, pour les éditions Climats. Il lui faut encore convaincre le directeur de la maison (je ne sais pas à ce moment-là qu’elle ne va pas tarder à être absorbée par Flammarion, si je me souviens bien). Le manuscrit est encore en attente chez Melville, une maison qu’Alain Veinstein a fondée avec Léo Scheer. Elle est récente, c’est peut-être une bonne idée.




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