Le 11 août 1917. Mes chers
parents.
J’ai reçu pas mal de courrier ces
jours-çi et je continue à recopier
la même carte avec la même faute parce que si les cartes se ressemblent c’est
parce que les jours se ressemblent, ce sont les cartes de Papa des
19-24.25.26 et 27 Juillet, une lettre de ma tante du 26 juillet et une carte de
la cousine Adélaïde du 21 juin. Adélaïde.
Non. C’est la première fois que je recopie ce prénom. Je suis bien
content de savoir que tout le monde est en bonne santé et ne souffre pas des
circonstances actuelles. L’euphémisme
de circonstance. Je ne saurai jamais si Edmond avait une vraie tendance à
l’euphémisme ou si il la doit à la conscience de la censure. La
lettre de ma tante est comme toujours très affectueuse mais un peu triste. Dites-lui
que je la remercie et que je l’embrasse bien fort. J’espère que Tante Marie
aura fait un bon voyage, et que tout se passera sans incident. Tante Marie. La sœur de mon
arrière-grand-mère. La marraine de mon père. Sans doute est-il la dernière personne
à se souvenir d’elle. Il y a le souvenir de la personne, et puis après il y a
le souvenir du souvenir. Dites à Geneviève que je lui souhaite bon
voyage et bon amusement. J’espère qu’elle aura emporté son appareil et qu’elle
m’enverra quelques épreuves. Je ne
savais pas que Tata faisait de la photo, surtout à cette époque. Je ne sais pas
grand-chose. Dites à la jeune Ninique (si je lis bien) que je la remercie et que je lui
envoie aussi mon bon souvenir ainsi qu’à ses parents. Ce pauvre Louis n’a
vraiment pas de chances avec ses permissions, on le fait toujours languir. Et toi, Edmond ? Quelle chance
as-tu ? J’ai reçu le colis n°11 Voilà ta chance : tu as reçu le colis n°11. Qui va t’aider
à manger et surtout te dire qu’il y a encore une place pour toi dans le monde
ailleurs qu’à Posen. le dernier avant l’arrêt, il était en bon état.
Nous ne savons pas comment arranger les haricots séchés. Vous aviez annoncé la
recette, mais je ne l’ai trouvé dans aucune de vos lettres. Ça m’étonne quand même que Daussy ne sache
pas arranger les haricots séchés. Après-demain ce sera le troisième
anniversaire de mon départ de Saint-Quentin. C’est
vrai que les Annocque étaient originaires de Saint-Quentin. Je n’ai jamais mis
les pieds à Saint-Quentin. Je n’ai jamais eu de raisons d’aller à
Saint-Quentin. Combien de temps me faudra-t-il encore attendre avant
d’y rentrer et dans quel état la retrouverai-je ? Enfin ça sera peut-être
plus tôt que nous ne le pensons. Quelle joie ce jour-là ! Mes chers
parents je pense toujours bien à vous, et espère que vous ne vous ennuyez pas
trop. Il n’a pas mis « de
moi ». Et de quoi d’autre ? Je vous quitte en vous
embrassant bien fort tous les deux ainsi que Geneviève et Louis, Madeleine et
Jean, et toute la famille. Mes meilleures amitiés à tous les amis. Votre fils
qui vous aime de tout son cœur. EAnnocque
Eh bien, dis donc!
RépondreSupprimerSi jamais- personne ne le sait!- "grand-pere" peut te lire, j,espere qu,il a le sens de l,humour:-;
(Daussy-cy- aussi!)