Il faut quand même que je vous dise que si je m’y connais un peu en lettres d’amour, c’est que j’en ai plein à la maison. C’est
Pascale Petit qui a imaginé celles que vous voyez ci-dessus et dont, je m’en rends compte à présent, j’ai cité hier la deuxième.
Pascale a toujours été une grande spécialiste des lettres d’amour, rappelez-vous :
Journal du coiffeur
2 juillet
Un jour, j’écrirai une lettre d’amour et je trouverai le moyen qu’elle la lise.
Je ferai courir le bruit que je vais monter sur mon beau cheval blanc.
Ou j’achèterai un trésor, des cordes, des munitions et deux redingotes de damas à fleurs.
Et je ferai un feu pour m’introduire chez elle et je mettrai ma main devant sa bouche pour l’empêcher de crier et pour
l’embrasser.
Ou
je dessinerai des lettres et des violons sur son grand lac gelé jusqu’à
ce que je devienne son petit esquif brinquebalé par
les flots et la tempête et conduit de force s’il le faut jusqu’à sa
fondrière : « nous vivions dans une coquille, nous allons voler en
éclats ».
(Mais si je ne lui écris pas en vers, voudra-t-elle s’enfuir avec moi ? Et qui lui dira, « je m’intéresse à vos
déplacements car ils intéressent, le ciel, la terre, les tremblements de terre, tout mes tourments", SI CE N’EST PAS MOI ?)
*
14 juillet
(Soir)
Un jour, j’écrirai une lettre d’amour et je trouverai le moyen qu’elle la lise.
Un jour, elle comprendra que j’aurai écrit toutes ces lettres parce que je n’arrivais jamais à écrire la même.
Un jour, elle trouvera toutes ces phrases et elle pourra choisir la plus belle.
Extraits du journal du coiffeur. Manière d’entrer dans un cercle & d’en sortir, éditions du Seuil,
2007.
C’est avec ce livre, lu dès sa parution, que je suis tombé amoureux du travail de Pascale Petit. Depuis j’ai lu tous ses livres.
Je ne pourrai pas vous dire lequel est le plus beau.
et de moi tu as peut-être une idée fausse
là, debout, un peu fléchie pour mieux solliciter une faveur
là, ouverte pour preuve que je t'accueille
là, pointée vers le ciel pour invoquer un autre monde
là, des petits oiseaux qui volent des figues
là, des tortues qui clapotent
là, des poissons collés aux parois
là, ce que tu prends pour une attitude altière
n'est que mon empressement
ma position entre deux mondes
pour explorer le passé
visiter le futur
et t'adorer sous une forme banale
Brouillon(s) de lettre(s) de la reine
20 juillet