Écartant alors ses mâchoires et
ramenant entre pouce et index sa lippe vers sa barbiche elle découvrit, rompant
seule la monotonie des gencives, une canine longue, jaune et profondément
déchaussée, taillée à représenter le célèbre sacrifice, à la fraise
probablement. Je la brosse cinq fois par jour, dit-elle, une fois pour chaque blessure.
De l’index de sa main libre elle la tâta. Elle branle, dit-elle, j’ai peur de
me réveiller un de ces quatre matins en l’ayant avalée, je ferais mieux de la
faire arracher. Elle lâcha sa lippe qui reprit instantanément sa place avec un
bruit de battoir.
Samuel Beckett, Malone
meurt.
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