Il y a des gens qui mettent des notes aux livres. Je vois ça sur des blogs, sur des sites où il est question de la littérature,
sur des sites marchands bien sûr – mais aussi dans des journaux à prétention culturelle.
C’est peut-être parce que par ailleurs je suis obligé de mettre des notes toute l’année, mais de voir ça les bras m’en
tombent ; si vous voyez des coquilles dans ce billet c’est parce qu’il est tapé avec les moignons.
Non
que les livres soient des objets sacrés ou les notes des pratiques
forcément inutiles mais dans ce cas-là : quoi ?
Je veux dire : qu’est-ce qu’on note ? Le livre ? Mais selon quels
critères ? – puisque si vraiment il est bon les critères précisément
n’existent pas encore.
Un petit rappel donc pour ces nostalgiques de l’école.
La
note, c’est un moyen de signifier à l’élève à quel degré il s’est
conformé à ce qu’on attendait de lui par rapport à un
objectif clairement défini (en espérant que plus tard, pourquoi pas,
il transcendera les modèles de ses apprentissages) car à l’école on est
encore en formation. Mettre une note à une œuvre
littéraire (ces petits cœurs ou ces étoiles qu’on voit partout et
qu’on vous oblige à mettre quand vous souhaitez juste formuler un avis),
c’est considérer que le livre, tel la copie que vous
rendiez jadis, doit se conformer à une attente. Or cette attente de
conformité est la négation de toute créativité. Le livre qu’on n’attend
pas (ou plus justement : un livre qu’on
n’attend pas) personnellement c’est à chaque fois celui que
j’espère. (Que j’espère lire, que j’espère écrire ; je ne sais pas bien
faire la différence.) Tout en étant bien conscient de
l’effet pervers de cette espérance : qu’elle soit confondue avec mon attente par un auteur qui ne chercherait qu’à me surprendre – et n’y parviendra pas, tant ses efforts
d’originalité (« pour faire genre original », dirait-on expressivement aujourd’hui) seront, précisément, attendus.
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