Le 7 juillet 1917. Mes chers
parents. La carte précédente date
du 28 juin, l’intervalle est nettement plus long que d’habitude. Peut-être
manque-t-il une carte.
Tout finit toujours par
s’arranger à peu près. Avec les mesures que nous avons prises, nous ne
souffrons pas du tout de ce nouveau (sic)
ennui. Je ne vois pas du tout de
quel ennui il s’agit. Il doit vraisemblablement manquer une date. Il
y en a même qui trouvent cela plus pratique, parce qu’ils n’ont plus besoin de
cuisine. Ça se discute ! Cela dépend un peu du nombre de colis qu’on a
l’habitude de recevoir. Mais enfin cela n’a guère d’importance, et il n’est pas
nécessaire de vous faire du mauvais sang sur mon compte, car je ne suis pas
malheureux. Le point, étiré
horizontalement, marque le changement de sujet, comme le ferait le changement
de paragraphe que, par souci d’économie de place, Edmond ne s’autorise jamais.
Je n’ai reçu ces cinq jours que les cartes de papa des 19 et 20 juin, c’est
peu, j’espère être plus heureux ce soir. Cette pauvre petite Jacqueline n’a
vraiment pas de chance, elle qui était si gentille, c’est malheureux. Dites-lui
quand vous écrirez que je pense à elle et que je fais des vœux pour qu’elle
guérisse bien vite. De nouveau, un
point étiré pour marquer le changement de sujet. L’écriture change un peu
aussi. L’espace entre les lignes est encore plus réduit. La lecture n’est pas
plus difficile pour autant : le crayon est très pâle et il me faut le
grand jour juste sous le vélux pour parvenir à tout déchiffrer.
Comme colis, ne sont arrivés à mon adresse ces jours-ci (« mon adresse » :
« Edmond Annocque sous-lieutenant – Stübe 77a Offiziergefangenenlager
Reisen in Posen » à l’encre noire au dos de la carte) que les
n°s 23 et 24. Je n’ai pu recevoir que les caramels et les lettrines. Les lettrines ? Je me trompe peut-être.
J’ai reçu aussi un colis de pain d’Annecy (si
je lis bien) du 15 juin et un colis de douceurs (seule la syllabe « dou » est à
peu près reconnaissable) de Mme Dehäenne (ou Deläenne ?), nougats, dattes et pain
d’épices m’ont été remis, une grande boîte de fruits au sirop a été retenue. C’est la première fois qu’il est fait
mention de colis « retenus ». Cela a peut-être à voir avec
« l’ennui » évoqué plus haut par Edmond, avec son habituel sens de
l’euphémisme qui doit sans doute quelque chose à la censure. Je vous
charge donc de la remercier pour moi puisque je ne puis le faire. Nouveau point étiré. Je crois
avoir oublié dans ma lettre de vous parler du pain (c’est donc peut-être une lettre et non une carte qui manque
entre le 28 juin et ce 7 juillet), vous pouvez en continuer les
envois. A part cela rien de neuf, tout est déjà rentré dans le calme. Le temps
est beaucoup moins chaud maintenant et plus supportable. J’espère que vous avez
reçu ma lettre dans de bonnes conditions (je
ne sais pas, la prochaine carte le dira peut-être) et que ma tante a
reçu aussi sa carte. Je pense que vous pourrez bientôt me donner des nouvelles
de Thérèse Dequenne. Sans doute la
même Thérèse déjà évoquée, je lisais Déqueuse dans la carte du 23 juin.
Je vous quitte mes chers parents en vous embrassant bien fort tous les deux
ainsi que Geneviève et Louis et toute la famille sans oublier Madeleine et
Jean. Mes amitiés à tous les amis. Votre fils qui vous aime de tout son cœur. EAnnocque
Je n'ai pas encore eu le temps de rapatrier Mon jeune grand-père sur ce blog, les anciens billets sont à cette adresse : http://hublots.over-blog.com/categorie-12529590.html pour les lecteurs qui ont adblock ou qui ne craignent pas la publicité.
RépondreSupprimerOui, il faut rapatrier votre grand-père!
RépondreSupprimerCela dit, il est, depuis un certain temps, un peu le nôtre aussi!
J'essaierai de ne pas trop tarder.
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