Je
n’ai pas lu les œuvres complètes d’Antoine Volodine mais j’ai lu celles
de Lutz Bassmann. (Lutz Bassmann, pour qui ne le saurait pas encore,
est l’un des plus fameux hétéronymes
d’Antoine Volodine.) (Antoine Volodine, pour qui ne le saurait pas
encore, est l’un des plus beaux auteurs contemporains.) (La littérature
contemporaine, pour qui ne le saurait pas encore, est
particulièrement vivante et créative – mais elle a de plus en plus
de mal à passer le mur du son.)
Depuis Avec les moines-soldats et Haïkus de prison, puis plus récemment avec les Aigles puent,
je ne peux m’empêcher de voir en Lutz Bassmann un Volodine atteint –
comme d’un
mal – d’un excès d’humanité, alors que le nom même d’humanité est
retiré à ceux qu’ils nous présentent et dont les noms étranges
s’égrènent à la fin du livre dans une table des matières pareille
à un monument aux morts qui n’en ont pas. Pas de monument, c’est
d’abord le cas pour Nathan Golshem. Sa sépulture, il faut la chercher
dans une décharge d’ordures aux confins de nulle part,
quelques déchets arbitrairement choisis dissimulés sous une tombe
invisible figurant sa dépouille perdue, aux yeux de ceux qui ont voulu
lui rendre un dernier hommage après sa disparition
définitive.
Définitive ?
C’est sans compter sur l’amour de sa compagne Djennifer Goranitzé qui,
après un périple de plusieurs mois, par
la magie de sa danse et à la faveur de l’obscurité, redonne jour
après jour vie à son mari pour se raconter dans la complicité du vieux
couple – par quel miracle de l’imagination réuni – les
histoires de leurs anciens compagnons, de leur engagement dans un
conflit perdu depuis des lustres et auxquels ils ne renoncent pas même
par-delà la mort.
La
présence de Nathan Golshem, grâce à la danse de Djennifer Goranitzé,
grâce à la magie de ces vieux chamans imaginaires nommés
Lutz Bassmann ou Antoine Volodine, grâce au ressassement de tous ces
noms, on y croit. D’ailleurs il est là, Nathan Golshem, là aussi, où
Djennifer Goranitzé malgré sa magie le voit sans le
reconnaître.
Ce roman d’amour, car au fond c’en est un – « seuls ceux que j’aime » martelait déjà Lutz Bassmann dans Avec les
moines-soldats ; cette Danse avec Nathan Golshem est publiée dans la collection Chaoïd des
éditions Verdier. (Verdier, pour qui ne le saurait pas encore, est l’un des éditeurs français les plus dignes de confiance.)
(J'en connais qui vont dire "fayot", je peux donner les noms.)
Commentaire n°1 posté par Depluloin le 15/02/2012 à 16h15