Il y a longtemps, lui semble-t-il,
qu’il n’a pas réellement rencontré quelqu’un, une personne qui éveillerait plus
qu’une simple curiosité, plus qu’une sympathie spontanée.
Nathan dit je ne sais pas si je
pourrai, si j’en suis encore capable. Ici et dans tous les musées où j’ai
travaillé, je retourne à la source. L’avenir m’oublie. Je me tiens sur la
ligne. Je vis de peu. Vous ne pouvez pas attendre, ce ne serait pas juste.
Elle dit vous êtes un drôle de
gardien. J’ai une petite fille, enfin, petite, elle a neuf ans. Son père m’a
quitté. Il est producteur de dessins animés ici. En République Tchèque et dans
les pays de l’Est, c’est très prisé vous savez, depuis longtemps. Il anime des
festivals aussi. Je l’aidais. Je l’aimais. Mais il paraît que je suis
insupportable. Vous en jugerez.
Ils marchent le long de la
Vltava, rive gauche, sous la pluie. Ils bifurquent vers Malotranske Namesti.
Elle dit il faut que vous me laissiez car j’attends quelqu’un, et il n’aimerait
pas nous voir ensemble, il est un peu jaloux.
Comme Nathan s’éloigne d’un pas tranquille,
elle le rattrape soudain et l’embrasse. Elle sent la vanille. Elle caresse sa
joue mal rasée avant de repartir.
Stéphane Padovani, Le
bleu du ciel est déjà en eux, « Garder », Quidam éditeur,
2016, p. 133-134.
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