Le 22 janvier 19167 - Mes chers parents. (Décidément
toutes ces cartes de janvier portent cette difficulté à passer l’an.
C’étaient des années qui ne passaient pas. Sur cette carte-ci l’article
« Le » aussi est surchargé par un autre « Le », bizarrement. On a
l’impression qu’Edmond a été interrompu au moment d’écrire – même si
bien sûr ça n’explique pas vraiment
cette correction d’un Le par un autre.)
C’est
la crise des colis en ce moment. Ils n’arrivent pas et la réserve
commence à être épuisée, car Daussy ne
reçoit rien non plus. Je n’ai reçu que le colis poste n° 17. Je me
demande quelle peut bien être la raison car il y en a qui les reçoivent
régulièrement. Comme correspondance, j’ai reçu les
cartes de papa des 8.9.10.12 et la lettre de maman du 7. Il fait
toujours très froid en ce moment, il gèle très fort. J’ai bien reçu une
fois des macarons, mais il y a très longtemps, c’était le
18 août et je crois en avoir accusé réception. Je
n’en trouve pas trace dans les cartes que j’ai déjà recopiées, pourtant
il y en a du
mois d’août. Mais peut-être cette carte s’est-elle glissée
ailleurs : j’ai conservé le relatif désordre dans lequel j’ai retrouvé
ces cartes et dont je suis peut-être moi-même responsable.
Ou peut-être a-t-elle été perdue. J’ai transmis au capitaine les renseignements il remercie bien papa du dérangement. On n’en saura pas plus. Vous êtes bien gentils de me donner des nouvelles de tout le monde. Je
remercie tous les amis de leur bon souvenir _ (Les
phrases toutes faites s’imposent d’elle-même, signes à la fois qu’il
n’y a rien à
dire et que dire est tout ce que qu’il y a à faire. Ce sont souvent
ces phrases, dans leur terrible banalité, qui m’émeuvent le plus :
« Vous êtes bien gentils de me donner des
nouvelles de tout le monde. » Même l’évidence mérite d’être dite.
Vous êtes bien gentils de me dire que le monde existe encore.) Je
ne suis pas toujours l’emploi du temps que je vous ai donné dans ma
dernière carte, car il y a des moments où je n’ai pas le goût de
travailler alors je lis ; la bibliothèque est très bien
montée et on n’a que l’embarras du choix. Je vous ai dit que c’était
D qui fait la cuisine. (« Ai dit » et
« c’était » surchargent d’autres lettres que je ne peux pas reconnaître.) Ms il ne faut pas croire que je ne fais rien c’est moi
qui suis chargé du chocolat, thé, boissons et c’est moi qui met la table. (Je rends hommage à l’orthographe de mon jeune grand-père en
recopiant cette faute – car c’est la seule.) Je vous quitte mes chers parents en vous embrassant bien fort tous les 2 ainsi que Geneviève
et Louis et toute la famille. Votre fils qui vs aime de tt son cœur EA
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