lundi 23 janvier 2012

Qui devenir (en écoutant Châteaureynaud)

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Grand plaisir et beaucoup d’intérêt à écouter hier après-midi Georges-Olivier Châteaureynaud interviewé par Pascale Arguedas, notamment à propos de ses deux derniers livres Résidence dernière et La vie nous regarde passer. De Châteaureynaud, j’ai vraiment aimé les deux livres que j’ai lus de lui – un recueil de nouvelles, Singe savant tabassé par deux clowns ; un roman, le Corps de l’autre. En bon lecteur égoïste, ce qui m’intéresse aussi, c’est essayer de saisir pourquoi j’éprouve ce plaisir et cet intérêt à la lecture d’une littérature a priori aussi éloignée de mes goûts affirmés – car Châteaureynaud, indiscutablement, ça raconte ; et à moi, en principe, il ne faut pas trop m’en raconter. Quoique. Les récits premiers, quand même, les contes, les mythes ; là, oui. A lui aussi, d’ailleurs. Début de réponse, peut-être.
Des extraits sont lus, au passage j’attrape un « Qui devenir ? » dans Résidence dernière, un « J’étais devenu un clone d’Henri Michaux » dans La vie nous regarde passer (je cite de mémoire, hein). C’est une autobiographie, celui-là. Déjà, quand on connaît un peu Châteaureynaud, une autobiographie, ça surprend. Puis l’expression revient, en direct, dans son propos : « Je ne serais pas devenu moi-même ». Bien sûr, une autobiographie, ça pose la question du qui devenir – et aussi, en l’occurrence, la question du de qui on vient – par exemple d’une figure disparate du père entre rescapé des camps et salaud de coureur de jupons. Ce qui devenir, bien sûr, me renvoie à ma lecture encore récente du Corps de l’autre, cette histoire d’un homme qui en devient un autre, pas seulement en passant dans le corps de l’autre.
A un moment, s’écartant de sa propre pratique de l’écriture, il évoque sa conception plus générale de la chose littéraire, en membre de comité de lecture et juré de prix littéraire qu’il est aussi ; et ce qu’il dit alors, sans doute parce que c’est général et qu’on ne peut parler de littérature qu’en parlant des textes dans leur singularité, m’intéresse soudain beaucoup moins, j’ai déjà dit ailleurs ce que je pense de la lecture à plusieurs et des consensus mous qui s’en dégagent ; mon esprit vadrouille un peu, je pense à ce qui me fait écrire, emprunter des chemins qui n’ont pas grand-chose en commun avec ceux de Châteaureynaud dont pourtant j’aime les livres, pas grand-chose en commun sauf le but peut-être, peut-être que tous les chemins qui mènent quelque part mènent vraiment à Rome, peut-être que Rome c’est un autre nom pour qui ou quoi devenir – un sujet de mythe, ou de conte merveilleux, c’est vrai.



Commentaires

Merci pour ce compte rendu Philippe. J'ai vu quand je lisais que tu te penchais, attrapais ton sac, saisissais un cahier pour noter je ne sais quoi et me suis dit : bingo, ça fait mouche de ce côté-là ;-).
J'aime beaucoup cet écrivain, ses écrits, et moi aussi j'ai été surprise par ses propos sur l'écriture que je ne partageais pas totalement - d'ailleurs je lui ai dit... mais à chacun sa vision, conception... richesse de la multitude des regards.
Commentaire n°1 posté par Pascale le 23/01/2012 à 20h43
Cette petite réserve juste à propos des considérations sur l'écriture en général - mais est-il seulement possible de parler de l'écriture en général quand l'oeuvre ne vaut que dans sa singularité ? Concernant sa propre écriture, je l'ai trouvé très juste et très intéressant.
Réponse de PhA le 23/01/2012 à 22h01
Moi aussi, même si je connaissais déjà ses explications puisque j'avais animé un débat l'année dernière avec lui. Mais justement, dimanche, j'ai eu l'occasion de creuser et de le faire parler là où je l'attendais. J'ai trouvé passionnante sa vision sur l'utilisation des mots, celle où seul le mot juste peut être finalement placer, comme dans un puzzle. Fascinant, même si je me demande si ce n'est pas plus théorique que possible.
Commentaire n°2 posté par Pascale le 23/01/2012 à 22h13
En tout cas ce pas à pas d'une phrase qui entraîne nécessairement la suivante, c'est quelque chose qui me parle.
Réponse de PhA le 23/01/2012 à 22h21
A moi aussi, beucoup.
Commentaire n°3 posté par Pascale le 24/01/2012 à 08h18
Le Colisée des mots doit remplacer l'Elysée des maux.
Commentaire n°4 posté par Dominique Hasselmann le 24/01/2012 à 08h20
J'aime bien aussi la collision des mots.
Réponse de PhA le 24/01/2012 à 12h54
Comme ici, elle est agréable aussi à l'oreille.
Commentaire n°5 posté par Dominique Hasselmann le 24/01/2012 à 12h57
j'écoute dès que je peux!
Commentaire n°6 posté par aléna le 26/01/2012 à 22h03
(Et pourtant je n'ai pas précisé que cette rencontre était organisée par la bibliothèque sonore d'Orsay.)
Réponse de PhA le 28/01/2012 à 11h46
oh! pardon! je suis à l'ouest! (et rien de nouveau...)
Commentaire n°7 posté par aléna le 29/01/2012 à 10h57

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