samedi 1 février 2025

Souvenirs de mon père, 25

Exode et bombardements, mai 1940


Puis vous êtes repartis. Vous avez marché des kilomètres. Quand vous arriviez dans un village, il n’y avait plus de pain, à cause des précédents réfugiés (vous vous étiez retrouvés dans un convoi de réfugiés.) Alors tu as déposé à terre les sacs qui étaient accrochés au guidon de ton vélo, et tu as dépassé le convoi à vélo pour arriver le premier au village suivant et avoir du pain.

Tu es arrivé à un embranchement de deux routes importantes. Juste à ce moment-là, des avions sont arrivés pour bombarder ce point précis. Devant toi, il y avait des paysans réfugiés avec des chariots tirés par des chevaux. Quand les premières bombes sont tombées, tu as sauté directement de la selle depuis ton vélo dans le fossé, sans mettre les pieds à terre.

En levant la tête, tu voyais au-dessus de toi l’éclat métallique des bombes qui brillaient au soleil dans leur chute. Tu avais l’impression qu’elles étaient juste au-dessus de toi. Elles sont tombées dans le champ de l’autre côté du carrefour et se sont enfouies dans la terre meuble avant d’exploser.

Quand tu es ressorti du fossé, après le départ des avions, tu as vu les deux paysans hébétés, debout, indemnes, qui tenaient les brides des deux chevaux morts, couchés sur la route. Tu n’as pas continué ta route, tant pis pour le pain. Tu es retourné vers Mamie et Milou pour les rassurer. Elles avaient vu le bombardement de loin et pensaient qu’en effet tu devais te trouver en dessous. Vous avez continué votre route, entrecoupée de bombardements.

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