lundi 3 février 2025

Le Contrat, par Franquin et Kafka, épisode 56

Pour mémoire, le Contrat est une adaptation des mésaventures de Monsieur de Mesmaeker, personnage récurrent dans les albums de Gaston Lagaffe de Franquin, à travers le prisme Kafka. Car Kafka est un prisme, et de Franquin à Kafka, il n’y a qu’un pas.


Quand Messerschmied retourna chez Brunnen, il fit savoir qu’il souhaitait traiter avec Monsieur Abakus ; il préférait encore les manières à l’ancienne mode de ce dernier. Confortablement assis dans un fauteuil du salon de réception, Messerschmied fumait son cigare ; il avait toujours eu un faible pour le cigare. Il venait de le déposer dans le cendrier afin de consulter encore une fois les termes du contrat que Monsieur Abakus avait disposé devant lui sur la table basse, lorsqu’il fut alerté par un bruit léger qu’il ne put identifier. Il se retourna, non sans une certaine inquiétude ; tout était normal. Il ne put toutefois mettre la main sur son cigare, qu’il avait pourtant, lui semblait-il bien, déposé dans le cendrier quelques secondes auparavant. Il en fut contrarié, mais comme il ne savait quoi en penser, il préféra s’atteler à la signature du contrat ; et c’est avec un soulagement qu’il ne parvint pas à dissimuler que, quelques instants plus tard, il tendait à Monsieur Abakus la liasse dûment paraphée qui, au moment même où Monsieur Abakus allait la saisir, disparut, aspirée par le cendrier, lequel devait être relié à toute une machinerie sans doute complexe, dont la motivation lui échappait. Un instant, la pensée le traversa que le monde, chez Brunnen, obéissait à d’autres lois que celui dans lequel il était né.

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