mardi 18 février 2025

Le Contrat, par Franquin et Kafka, épisode 58

Il se passa du temps avant que Messerschmied ne retourne chez Brunnen. Il se disait bien que c’était quand même dommage de ne pas signer le contrat, mais il se retenait. Peut-être, à n’avoir plus de nouvelles de lui, peut-être désirerait-on son retour, chez Brunnen ? Mais il n’avait plus de nouvelles. On ne lui téléphonait pas ; on ne lui écrivait pas. Que signifiait ce silence ? Messerschmied se disait que, sans doute, on n’osait plus le déranger, mais qu’en fait, on n’attendait que lui, que c’était à lui de faire le premier pas. Alors, un beau jour, il le fit. Il se rendit chez Brunnen. Il croisa un petit moustachu, à qui il demanda si Monsieur Schlehe était là. Ou Monsieur Abakus. Oui : Monsieur Schlehe était là ; on lui répondit que ce dernier allait être aussitôt averti de la présence de Messerschmied ; et de fait, Monsieur Schlehe arriva quelques instants plus tard. Il avait l’air très heureux de voir Messerschmied, et cela réconforta Messerschmied : il était donc le bienvenu chez Brunnen. En passant dans le couloir, Messerschmied entendit comme une rumeur qui venait d’un bureau fermé. Monsieur Schlehe lui expliqua qu’il s’agissait d’un spectacle de marionnettes, qu’un de leurs collaborateurs avait organisé à l’intention de ses collègues. L’attention parut charmante à Messerschmied ; d’ailleurs depuis l’enfance il avait toujours gardé l’amour des marionnettes. Au mépris de l’indiscrétion, il se permit d’entrouvrir la porte. Et Messerschmied vit, par-dessus les têtes des employés qui s’esclaffaient, une marionnette dans laquelle il ne put s’empêcher de se reconnaître.

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