Tiens puisque ça fait 30 je vais peut-être m’arrêter là, au
moins pour le moment. Ce qui suit est trop contemporain pour être
raconté. Et puis vous verrez, ça a un sens de s’arrêter là.
En
janvier j’envoie Mémoires des failles à Philippe Garnier,
qui à l’époque est directeur éditorial chez Denoël. Ce n’est
pas que je croie à une possible publication de ce texte, surtout
celui-là, chez Denoël, mais j’ai la conviction que Philippe
Garnier, lui, peut l’aimer – et aussi qu’il a une chance de
connaître déjà mon travail puisque lui aussi a publié chez
Melville. Mon père s’est perdu au fond du couloir, un petit
livre étrange que j’ai vraiment beaucoup aimé. En effet, le
surlendemain ou quelque chose comme ça de mon envoi, il m’écrit
que Mémoires des failles le passionne, mais qu’il n’est
pas sûr du tout que Denoël puisse quelque chose pour ce texte. Ça
se soldera en effet par un repas à deux au restau ; Olivier
Rubinstein, qui dirige Denoël à ce moment-là, n’est pas
favorable. J’ai du mal avec les patrons, décidément. Mais bon, ça
fait plaisir quand même.
C’est
l’époque où, roulant sur la Nationale 10 – justement je vais
faire reproduire le manuscrit de Liquide – en écoutant
France Culture je tombe sur les Mardis littéraires de Pascale
Casanova. L’invité n’est pas un auteur mais un éditeur, Pascal
Arnaud. Il présente l’Ami Butler de Jérôme Lafargue,
qu’il publie chez Quidam. Quidam, je ne connais que de nom. Le gars
a l’air passionné. Je me dis que peut-être, je devrais lui
envoyer quelque chose. La lecture de l’Ami Butler me le
confirme. C’est Monsieur Le Comte au pied de la lettre que
je lui envoie. Ce n’est pas un texte facile à publier, mais je ris
toujours en le relisant. Et il me ressemble beaucoup. Je ne prends
pas garde que le récit fait allusion, vers les premières pages, à
« de peu scrupuleux quidams ». Très vite je reçois un
clin d’œil de l’éditeur : « N’ayez crainte :
le Quidam vous lira très scrupuleusement. » C’est engageant.
J’attends un avis ; il ne vient pas.
Je
continue, mais assez lentement l’écriture du roman qui à cette
époque s’appelle encore juste Liev. Je lis beaucoup. L’idée
d’un blog me tente. J’en lis plusieurs très quotidiennement. Le
premier, ça a sans doute été les Lignes de fuite de
Christine Genin ; j’y ai trouvé beaucoup d’idées de
lecture. Didier da Silva et ses Idées heureuses m’y pousse
un peu aussi. Bien sûr je lis aussi l’Autofictif de
Chevillard, depuis le premier jour. J’ai envie d’y mettre un peu
de tout. Aussi bien des avis de lecture, des billets d’humeur, des
feuilletons littéraires. C’est pour Hublots, dès 2008, que
je commence à concevoir Vie des hauts plateaux, qui plus tard
deviendra un livre chez Louise Bottu.
Sans
nouvelles de Quidam, je le relance, par acquit de conscience ;
je crois que c’est mort. Pas du tout. Il me dit que Monsieur Le
Comte lui plaît beaucoup, et qu’il est sûr que j’ai autre
chose à lui proposer. Pas fou. Je lui envoie Liquide. Il
prend tout, et la suite. On se voit, on discute. Je me souviens que
très vite, on parle de littérature, de Raymond Federman, de Céline
Minard : des livres que je n’ai pas écrits, qu’il n’a pas
publiés.
Oui ça fait 31 au lieu de 30. Ne chipotons pas.
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