Pas besoin d’écrire l’article, il s’en est chargé. Et fièrement. Admirez donc mon ignorance comme elle est crasse. (En tout
cas voici l’occasion rêvée d’appliquer mon conseil d’hier. Notez que je n’avais pas encore lu ce billet au
moment dudit conseil – et que mes rêves aussi sont d’une autre sorte.)
Il
s’agit donc d’une réaction à une réaction à l’affaire Millet. A ce
degré-là de réaction, de Millet il n’est plus guère
question et personnellement je m’en réjouis, n’éprouvant que peu
d’intérêt pour ce mauvais sujet. Plus précisément, il s’agit d’une
réaction à la lettre d’Annie Ernaux,
cosignée par une centaine d’auteurs mais
pas par moi, ne voulant pas en rajouter à l’ignorance de Patrice
Besson qui n’en avait pas besoin. En réalité si on m’avait demandé mon
avis (qu’on ne m’a pas demandé c’est pourquoi c’est à vous
que je le donne), je n’aurais sans doute pas signé ce texte qui, au
fond, doit faire plaisir à Richard Millet. Une sorte de plaisir un peu
étrange mais du plaisir sûrement – et même du plaisir
assuré : le voilà Christ, c’était cloué d’avance. Mais foin de
Millet, laissons-le aux oiseaux. Ce qui m’intéresse, c’est l’ignorance
de Patrick Basson. « On n’a pas besoin de
talent » pour être lecteur, écrit-il ; nul doute en effet que ce
talent lui manque – au moins aujourd’hui. D’Adam, par exemple, Patrick
Bosson ne connaît qu’Olivier. Pas Philippe.
D’emblée, ça situe un peu le niveau du lecteur. (L’auteur, je n’en
parlerai pas : je l’ignore aussi. Mais je connais son nom, vaguement.)
Incapable de recopier convenablement un nom propre,
il nous féminise Laurent Cauwet. (Vous me direz si je me trompe,
mais Laurent Cauwet, c’est bien le monsieur d’Al dante ? On n’a pas le
temps de refaire tout le catalogue aujourd’hui – mais
c’est bien là que j’ai lu pour la première fois Raymond Federman,
grâce donc lui soit rendue.)
Je
ne vais pas non plus refaire la liste des ignorances de Jean-Patrick
Beston (il ne connaît pas Liliane Giraudon ! le
malheureux !), il le fait très bien lui-même. Non, ce qui
m’interroge, c’est plutôt cet emploi de l’ignorance en guise d’argument.
Moi, Patrick Weston, je ne connais pas ces gens ; donc
leur avis ne vaut rien. Voilà en effet un argument imparable : son
lecteur n’en connaît probablement pas davantage. Mais son lecteur n’est
pas supposé passer autant de temps « dans les
librairies et les bibliothèques » (à quoi y passe-t-il donc son
temps, Bison Patraque ?), en tout cas le lecteur n’est pas supposé
connaître la littérature française contemporaine aussi bien
que l’un de ses représentants les plus distingués.
Que
le lecteur tout honteux d’en connaître encore moins que Maurice Veston
se rassure : les auteurs ignorés de ce dernier
sont en effet bien trop ignorés – mais pas de tout le monde quand
même, heureusement. La littérature française contemporaine souffre d’une
crise de sa représentation dont l’ignorance de Patrick
Besson est un coupable indice. Ceux-là même qui devraient en
priorité s’intéresser à la création contemporaine se replient trop
souvent dans un confortable entre-soi, ainsi peuvent-ils continuer
à rêver qu’ils représentent encore ce que trop souvent ils
desservent.
Que peut-on faire avec un tel bonhomme qui croit faire de l'humour mais démontre juste sa bêtise, sa jalousie et sa méchanceté ? Le fuir !
Je suis d'ailleurs surpris que vous soyez le seul à relever ce papier aussi grotesque qu'abject, où le nom de l'un des plus importants éditeurs de poésie contemporaine n'est que le prétexte à un jeu de mot sur Cauet, et où sont superbement ignorés des auteurs comme Céline Minard, Mathias Enard, Alban Lefranc, Mathieu Larnaudie, Christian Pirgent - et j'en passe, tout cela, au final, pour faire la publicité de son bouquin - qui se veut sans doute la version ignorante et satisfaite de La littérature sans estomac de Pierre Jourde.