J’ai déjà dit ce que je pensais de la règle « Le masculin l’emporte sur le féminin » ; je lui préfère : « Quand il n’y a pas lieu de préciser le genre, on ne met pas de marque de genre » (étant entendu qu’en français, la seule marque de genre est le féminin et que de facto n’existent dans cette langue que le féminin et le non-féminin – le masculin y étant défectif).
Le même problème se pose pour le nombre, sans polémique à la clé – et du coup ça n’intéresse plus personne, sauf moi, et je trouve ça un peu dommage. Comme le masculin, le singulier est défectif en français : la seule marque de nombre est le s du pluriel. De là à croire que tout ce qui n’est pas pluriel est singulier, il n’y a qu’un pas, abusivement franchi sans se poser de questions (car on n’aime pas se poser de questions). Je n’ai pas de blé dans mon grenier, n’ayant ni blé ni grenier ; mais si j’avais du blé dans mon grenier, ce blé sans s ne saurait être considéré comme un singulier. En effet « blé » est un substantif non comptable : on ne compte pas le blé (les grains oui, mais pas le blé). Ce qui n’est pas comptable est intrinsèquement étranger à la notion de nombre. On ne saurait donc considérer « du blé » comme un singulier, si ce n’est par abus de langage, et à cause de l’illusion induite par l’absence de s. « Quand il n’y a pas lieu de préciser le nombre, on ne met pas de marque de nombre » ; ma règle concernant le genre est parfaitement adaptable au nombre. On aurait tout à gagner à affirmer que concernant le nombre, n’existent en français que le pluriel et le non-pluriel.
Intérieurement, ça me va très bien, cette absence de singulier. Si le genre fait partie de l’identité, franchement, pourquoi pas le nombre ?
(Un jour peut-être quelqu’un affirmera que tous mes romans, mes poèmes, mes textes ne sont que la figuration d’un grand livre de grammaire jamais écrit.)
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