lundi 7 janvier 2019

Derrière le cirque d'hiver


Ça commence comme une série de portraits, apparemment indépendants les uns des autres, mais de personnes réelles, connues de l'auteur ou juste de vue, ou même seulement croisées, ça laisse les choses se dire d'elle-même car on ne sait pas encore vers où ça va ; le livre qu'on est en train de lire s'écrit en même temps sous les yeux ; il laisse venir ce dont il est vraiment question, mais doucement, tout doucement, car on est jamais sûr de savoir de quoi parle vraiment ce livre qu'on est en train d'écrire, jusqu'à ce que peu à peu, il finisse par le dire, en parlant de cet homme rencogné dans un coin de mur, de cet autre qui a vécu autrefois dans l'appartement où l'on habite, de ce même pas vraiment aïeul connu pour de mauvaises raisons, de cette maison de retraite, de ce mutisme de l'enfance. Ça finit par le dire sans le dire et ça s'appelle Derrière le cirque d'hiver. L'auteur, c'est Xavier Person, l'éditeur Verticales et vraiment c'est très beau.



« Il va pour s'avancer et quelque chose le retient. Sur le quai du métro République, il voudrait progresser mais une force trop grande l'en empêche. Tout ce à quoi il parvient est de rester debout. Il se concentre pour ne pas tomber, son avancée se réduit à son immobilité si fragile et menacée. Ce qu'il désire peut-être, on peut l'imaginer, ce à quoi il aspire serait de se laisser tomber à même le sol, au milieu de la foule : quoi qu'il puisse arriver, s'allonger et dormir, céder au trop grand remuement qui telle une tempête invisible l'assaille. Je le vois si démuni face à cette rafale, il vacille dans son ivresse et que faire sinon chercher à ne pas le perdre de vue quand déjà mon métro s'éloigne ? »

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