Dans
Annocque il y a le coq & l'âne. Car enfin qu'est-ce que cet
auteur qui publie successivement un recueil d'aphorismes poétiques
sur les plantes les champignons et les animaux, un roman érotique
virtuel, et maintenant un recueil de cartes d'un prisonnier de la
première guerre mondiale ? Du même auteur ? Vraiment ?
Évidemment
non. Évidemment le même auteur n'est jamais même. Et pourtant si.
Et pourtant c'est le même.
Car
Notes sur les noms de la nature n'est pas un recueil
d'aphorismes poétiques sur les plantes, les champignons et les
animaux. Bien sûr il a fallu pas mal de botanique, de mycologie et
de zoologie pour l'écrire (parce qu'on écrit avec ce qu'on connaît
et que tous les sujets sont bons) et pourtant c'est avant tout un
livre sur les mots. Sur les noms, plus précisément. D'ailleurs
c'est écrit dans le titre. Quant à Seule la nuit tombe dans ses
bras, ce n'est pas, ou en tout cas pas seulement, un roman
érotique virtuel, ni seulement un roman d'amour virtuel, ni
seulement une évocation sociétale des nouveaux modes de relation à
l'ère numérique ou quelque chose comme ça, mais une invitation à
s'interroger sur ce que peuvent, ou ne peuvent pas, les mots – mais
cette fois-ci, entre les gens.
Et
donc le 8 novembre paraîtra aux éditions Lunatique Mon jeune
grand-père. Bien sûr, il s'agit des cartes que mon grand-père,
tout jeune, écrivait à ses parents pendant sa captivité en
Allemagne du printemps 1916 jusqu'à la fin de la guerre, et que j'ai
recopiées en donnant à lire en même temps ma propre lecture
immédiate. Rien de plus éloigné a priori des deux livres
précédents. Et pourtant, en relisant Mon jeune grand-père,
j'ai eu la surprise de trouver sous ma plume la même référence à
Austin (« how to do things with words ») qu'au début de
Seule la nuit tombe dans ses bras – non, je m'en souvenais
pas. C'est que Mon jeune grand-père est aussi, à sa manière
toute différente, un livre sur les mots. Quand les mots sont tout ce
qui reste pour dire « je pense à vous », « je vous
embrasse », « je suis vivant ». Pour le dire, sans
pouvoir le faire, parce que la vie n'est plus visible, la vie est
enfermée. Oui la vie a été sauvée par la captivité, très
certainement ; mais la vie a été ôtée par la captivité,
très probablement. Mais ça je vous le laisse lire.
C'est bien ainsi que j'ai "compris" ton envoûtant "Seule la nuit tombe dans ses bras": le pouvoir des mots, différent selon chacun(e) et, d'ailleurs, je crois te l'avoir écrit!
RépondreSupprimerOui Chris, et merci !
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