Ces polémiques
récurrentes (sous le lien c'est faut-il célébrer Maurras, comme il
y a quelque temps faut-il célébrer Céline) ne sont intéressantes
qu'en ce qu'elles disent du rapport religieux que le public
entretient avec la littérature (comme avec le football ou la
politique, d'ailleurs, même combat). Car enfin, quel sens cela
peut-il bien avoir, de fêter la date anniversaire de la naissance ou
de la mort d'un écrivain ? La réponse à ces questions devrait
s'imposer d'évidence : bien sûr que non, il ne faut célébrer
ni Maurras ni Céline, mais Camus pas davantage. Ni même Proust.
Personne. Aucune personne ne mérite d'être célébrée.
On devrait avoir dépassé l'âge de l'idolâtrie. En revanche, on
peut, pourquoi pas, rendre hommage à une œuvre, quand elle le
mérite – car toute grande œuvre dépasse son auteur, qui n'est
jamais, à lui seul, l'auteur de l'œuvre ; toute œuvre est
l'œuvre de l'humanité entière par le truchement de son auteur. Et
pour la littérature, si l'on tient à fêter des anniversaires, il
se trouve que chaque livre est pourvu d'une date de parution. Fêter
la naissance de l'auteur des Beaux Draps, sûrement pas ;
mais fêter l'anniversaire de la parution de Voyage au bout de la
nuit, pourquoi pas ? Et comme on ne va non plus multiplier
les anniversaires, on en viendrait alors à se demander si, pour
Camus, il vaut mieux par exemple célébrer l'anniversaire de
l'Etranger ou de la Chute, considérant a posteriori
que la Peste, finalement, c'est quand même assez laborieux
par rapport au reste de son œuvre – au moins comme ça on en
reviendrait à parler un peu de littérature.
Un propos juste qui fait réfléchir sur les réflexes de notre société. Merci Philippe.
RépondreSupprimerMerci Serge !
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