mercredi 6 octobre 2010

quelque chose dont tu ne sais pas encore bien ce que c’est


Te voici donc prêt à attaquer les premières lignes de la première page. Tu t’attends à retrouver l’accent reconnaissable entre tous de l’auteur. Non. Tu ne le retrouves pas. Après tout, qui a jamais dit que cet auteur avait un accent entre tous reconnaissable ? On le sait : c’est un auteur qui change beaucoup d’un livre à l’autre. Et c’est justement à cela qu’on le reconnaît. Mais il semble vraiment que ce livre-ci n’ait rien à voir avec tous les autres, pour autant que tu te souviennes. Tu es déçu ? Un moment. Il est normal que tu sois un peu désorienté au début, comme lorsqu’on vous présente quelqu’un dont on avait associé le nom à un visage, et qu’on tente de faire coïncider les traits qu’on voit avec ceux dont on se souvient. Et cela ne marche pas. Et puis tu poursuis ta lecture, et tu t’aperçois que le livre se laisse lire indépendamment de ce que tu attendais de l’auteur. C’est le livre en soi qui attise ta curiosité, et, à tout prendre, tu préfères qu’il en soit ainsi. Te retrouver devant quelque chose dont tu ne sais pas encore bien ce que c’est.
 
Italo Calvino, Si par une nuit d’hiver un voyageur.
 
Encore un texte étudié avec les 3e, et une belle occasion de les mettre en garde contre ce que j’appelais l’autre jour les « lectures encombrées ».
Ceux qui me suivent de près savent pourquoi ce texte me parle si fort. Allez, demain je développe la question.


Commentaires

je ne veux pas faire la rabat-joie, mais si vous avez des élèves qu'il faut prémunir contre les lectures encombrées, vous avez de la chance - c'est qu'ils ont lu au moins un livre :)
Commentaire n°1 posté par Aléna le 06/10/2010 à 12h12
Oh, pas besoin de lire beaucoup pour que les lectures soient encombrées !
Réponse de PhA le 06/10/2010 à 13h42
Je vous suis "d'assez loin" mais je vous comprends, enfin, je comprends que "ce texte vous parle si fort". Vous n'êtes pas toujours "seul à voir" cher Philippe.
Commentaire n°2 posté par Ambre le 06/10/2010 à 12h38
C'est que vous en avez lu un peu plus que la moyenne !
Réponse de PhA le 06/10/2010 à 13h43
Les lectures encombrantes plutôt? Oh pardon M'sieur! j'ai pas écouté en classe! :) 
Ceci dit, j'aime m'encombrer d'un bon auteur celui qui laisse toujours à désirer, qui ne laisse jamais de découvrir ce qu'on a mal lu jadis! (Ma (re)lecture de Madame Bovary, il y a quelques années tout de même m'avait laissé sur le flan! D'ailleurs, je me demande si je ne vais pas y remettre le nez - dans ce livre pas dans Madame Bovary - ah les phrases mal parties!) 
Commentaire n°3 posté par Depluloin le 06/10/2010 à 14h02
Flaubert, c'est peut-être le premier auteur que j'ai vu, à chaque livre, tout remettre en jeu.
Réponse de PhA le 07/10/2010 à 22h21
Déposer sagement le livre sur le bureau. Ne pas l'ouvrir, ajourner sine die cette opération pour épaissir le mystère comme on épaissit une crème.
Commentaire n°4 posté par Gilbert Pinna le 06/10/2010 à 14h32
Ah oui, j'aime ça aussi ! (Mais la gourmandise est parfois irrésistible.)
Réponse de PhA le 07/10/2010 à 22h21
Demain, bel encombrement à prévoir (prévisions de Rosny-sous-Livres).
Commentaire n°5 posté par Dominique Hasselmann le 06/10/2010 à 14h49
Chouette ! J'adore ce genre de bouchons (de champagne)
Réponse de PhA le 07/10/2010 à 22h22

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