Donc j’ai lu Kree, de Manuela Draeger. Il est paru au début de l’année 2020, il fait partie de ces livres qui ont encore plus de chances que les autres d’être oubliés. Ce serait dommage. Ce serait d’autant plus dommage pour les lecteurs qui ne connaîtraient pas encore l’œuvre d’Antoine Volodine. Kree en est une nouvelle entrée très accessible, notamment parce que c’est clairement un roman, et qu’on y a clairement un personnage principal, Kree Toronto, dont on suit les vies (et là quand même permettez-moi de glisser un pluriel discret). C’est une jeune femme, l’une des plus badass de tout le post-exotisme. Je ne raconte pas n’importe quoi en disant que c’est aussi un roman d’amour et d’amitié, et aussi un roman politique. Tout ça, c’est vrai, mais ne vous y trompez pas : je l’écris juste pour racoler le lecteur. Ça ne vous dit pas pourquoi je ne voulais pas qu’il s’arrête à la fin. Ça ne vous dit pas pourquoi j’aime tout ce qu’écrit Volodine. Je n’essaierai pas. Il est plus facile d’ouvrir le livre au hasard, tiens, voilà, page 232, et d’en recopier quelques lignes, juste histoire de brouiller un peu tout ce que je viens de dire.
« Un jour il a l’impression que dans le voisinage immédiat s’est formé un deuxième œuf et, six à sept semaines plus tard, il sent un très doux contact entre eux deux. L’échange dure, d’abord avec des intermittences, puis en continu. C’est Smoura Tigrit. Elle sait son nom. Elle en est fière, d’après elle c’est un nom d’origine ybüre, et le nombre de survivants ybürs est infime. Griz Uttikuma objecte que le nombre de survivants des autres peuples est infime, lui aussi, quel que soit le peuple. Ce constat lugubre les fait rire. Sur des plaisanteries noires de ce genre se noue leur amitié. »
Kree, comme les autres publications de Manuela Draeger qui ne sont pas destinées à la jeunesse, est paru aux éditions de l’Olivier.
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