NUKI-UCHI
Sous la corolle de l’arbre en
pleurs, je dus faire un immense pas en arrière pour esquiver la lame qui devait
me trancher au milieu du crâne, un pas rompu très fléchi à l’aplomb de l’agenouillement,
un pas dont l’angle réduit par ma jambe droite aussitôt ramenée, dégaina le
sabre sur une parabole atteignant la verticale au moment où me frôlait au
ventre le sifflement de l’arme adverse.
Je dus lui enchaîner un pas en
avant alors que ma main gauche se portait à la poignée de mon sabre brandi au-dessus
de ma tête pour l’abattre au front de l’ennemi et lui appliquer à la ligne ce
qu’il m’avait réservé, une entaille de partage à l’exacte frontière de ses deux
narines.
L’arbre qui nous couvrait avait
tenté de nous séparer. Je dus lancer sèchement la lame sur l’horizontale pour
en détacher le rameau flexible et collant qui avait un instant occulté mon
angle de coupe pendant l’attaque.
Je dus faire un autre pas en
avant pour rengainer. Et lorsque la garde de mon sabre rejoignit la gueule du
fourreau, je me souvins des vers de Chiyo-ni parmi les tentacules délicats de l’arbre
trois fois centenaire, et mes regrets furent liquidés.
Tout en les regardant,
Je les oublie,
Les feuilles du saule pleureur !
Céline Minard, KA TA,
Rivages, 2014, emballé par scomparo.
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