C’est la rentrée littéraire one
more time. La preuve : Michel Houellebecq sort un nouveau roman. On ne parle
plus que de ça. Alors il faut vite le lire, pour se faire son opinion.
Comme ça après on pourra en parler. Se faire son opinion est une bonne
raison pour lire. La meilleure, même. Par contre il faut faire vite, parce que
dans quelques mois le dernier Houellebecq ne sera plus un sujet. Et c’est sans
doute pour ça aussi qu’on lit : pour avoir un sujet de conversation.
Mais on ne peut pas non plus lire
tous les livres, et personnellement j’en ai déjà plein en retard, alors je
crois que je vais me passer de mon opinion. C’est dommage, je suis sûr qu’elle
aurait intéressé plein de monde – mais sûrement moins que mon opinion sur Courants
blancs de Philippe Jaffeux ou sur les Morts rigolos d’Antoine Boute,
parmi beaucoup d’autres lectures à venir. Ça me fera une opinion en moins à
monnayer dans les conversations littéraires, mais il faut bien faire des choix.
Enfin, moi, j’aime bien faire mes
choix, quoi.
Et ce billet n’est pas du tout
contre Houellebecq. Je n’ai rien a priori contre sa Soumission – mais
contre celle de l’opinion qui m’imposerait telle ou telle lecture, clairement
oui. Je ne me suis jamais dit : « Je ne lirai pas Houellebecq ».
D’ailleurs j’ai déjà lu Houellebecq, et bien aimé, et encore lu Houellebecq, et
pas aimé ; je pourrais très bien tabler sur le caractère algorithmique de
ma lecture de Houellebecq et considérer qu’il y a de bonnes chances pour que
j’aime le prochain que je lirai. Eh bien c’est exactement ce que je fais :
la prochaine fois que j’ouvrirai un livre de Houellebecq, ce sera parce que je
considèrerai qu’il y aura de bonnes chances que j’aime ce que j’y lirai. Au
moins autant que dans d’autres livres d’autres auteurs que pendant ce temps et
faute, précisément, de ce temps, je ne lirai pas. Parce que, plutôt que de lire
pour pouvoir me faire mon opinion et la donner ensuite (je doute que donner
soit le bon mot : quand on lit pour se faire une opinion je me demande
toujours si ça n’est pas plutôt pour la vendre), je préfère choisir mes lectures
en fonction du plaisir que j’espère en tirer.
Ah! Vous me soulagez! Parce que c'est vrai, il y en a tellement de livres en attente chez moi que celui dont vous parlez attendra son tour si jamais il vient. Et d'ailleurs personne n'attend mon opinion, ici, la vie est rurale et tranquille. On y fait ses lectures pour le plaisir, en effet.
RépondreSupprimerVive la tranquillité.
SupprimerJe rejoins à 100% le commentaire de X. Ne fréquentant aucun dernier salon, aucun café littéraire, aucun atelier d'écriture, me tenant à l'écart du gratin d'endives, je ne sais, moi non plus qui quémanderait mon avis. Je lis, je lis...c'est bon pour ma santé.
RépondreSupprimerSanté !
SupprimerCher Philippe, très bien, ta manière d'aborder "le dernier livre dont on parle".
RépondreSupprimerJe ne me "soumettrai" pas non plus à ce diktat marketing, et sa fâcheuse (pour ne pas dire plus) "connexion" avec les événements actuels, que tu ne pouvais pas prévoir le 6 janvier, rend sa lecture encore moins nécessaire.
L'impact éventuel de ce roman surfant sur l'ambiance "islamophobe" présente, amalgamant de fait Islam avec le terrorisme de types sans cervelle - bien mis en valeur par Laurent Joffrin ce matin dans "Libé" - a même dû pousser Houellebecq (ou son éditeur) à "annuler sa promotion" dès aujourd'hui et à prendre la poudre d'escampette vers la Suisse.
J'attendrai que son opus paraisse en poche, si je pense à l'acheter dans un an.
L'actualité me semble plus inquiétante ces jours-ci en France que la photo de l'écrivain à tignasse négligée et ses lignes au style "neutre" et "mélancolique".
En attendant on peut toujours relire les Fruits d'or de Sarraute (à chaque fois que paraît un contournable incontournable je pense aux Fruits d'or).
SupprimerHe entrado a leer la opinión de Annocque sobre el último libro de Houllebecq y lo que me he encontrado es que Annocque no tenía algo que decir sino que tenía que decir algo
SupprimerJe n'ai rien à dire sur ce livre mais j'ai à redire sur la prétendue nécessité, imposée par quelques médias fatigués, qu'il faudrait absolument lire tel livre qu'ils ont élu pour son sujet (outre la notoriété de son auteur) quand tant d'autres me procureront bien davantage de plaisir. (Et bien sûr le titre de ce billet est un piège où je vous remercie d'être tombé.)
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