vendredi 23 janvier 2015

Mon jeune grand-père (67)



Le 18 juillet 1916
Cette carte-ci a l’air bien plus lisible que la précédente.
Mon cher Papa,
Depuis ma carte du 14 je n’ai reçu qu’une lettre de toi, celle du 4 qui m’annonce l’envoi du 1er colis par chemin de fer. Il y en a d’autres d’arrivés mais les interprètes ne sont pas assez nombreux et nous sommes forcés d’attendre. C’est pourtant bon de recevoir des nouvelles, c’est avec l’arrivée des paquets le seul bon moment de la journée ! Edmond avait commencé à écrire un autre mot qu’il a surchargé par « bon ». Tu ne me parles pas de ma tenue, peut-être n’as-tu pas reçu la lettre la demandant. Donc je répète envoie-moi ma tenue : mon béret, mes bandes molletières, mon képi. Des bretelles les miennes sont usées. Mets-moi aussi quelques bouquins, quelques-uns pour lire d’autres pour travailler : histoire, géographie, mathématiques, physique. Les journées sont si longues qu’il faut bien trouver un moyen de les employer quoiqu’il semble difficile de se mettre à un travail régulier et suivi. _ On nous a prévenus que toutes les cartes avec des drapeaux français ou alliés ne nous seraient pas distribuées. De même si dans un paquet il y a des drapeaux ou cocardes sur un objet, le paquet sera confisqué. Comme paquets j’ai reçu jusqu’au numéro 18. Aujourd’hui contrairement à mon attente je n’ai pas reçu le n° 19 qui aurait pourtant été le bienvenu, car toutes les provisions précédentes étaient épuisées. J’ai en effet oublié de demander des pantoufles, ce sera assez utile. J’espère que vous êtes toujours tous en bonne santé C’est l’espace restant qui en se réduisant amène déjà la conclusion. Le sens même du texte est dépendant du petit rectangle où il est contraint de s’inscrire. Il n’y aurait pas la place pour ces commentaires que je rajoute. et que Louis se plaît dans son nouvel emploi. Emploi ? Louis a été brancardier, c’est sûrement ça. Toujours pas de nouvelles de M. Desmarets il faut bien deux mois paraît-il. Il y en aura. En avril de l’année suivante au plus tard. Je vous embrasse tous bien fort et de tout Edmond n’a pas encore l’habitude de cette petite surface. Plus tard il tombera juste à chaque fois. Cette carte-ci s’arrête à « tout », coincé dans l’angle en bas à droite.

2 commentaires:

  1. La guerre a duré longtemps. L'écriture a su la fixer pour nos yeux plus tard.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Deux ans de captivité pour Edmond.
      Il y en a pour qui elle a été courte, mais je ne sais pas si on peut appeler de la chance.

      Supprimer