dimanche 3 octobre 2010

Franck n’a personne qui lui écrit

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Un matin de décembre, à force de quadriller toujours le même parterre, église, crèche, école, moi aussi j’en ai marre de ces limites et je descends plus bas, à peine quelques mètres de plus.
Pour rien, juste pour voir. Là j’apprends, de quelqu’un du quartier qui vous connaîtrait bien, comme ça, discussion devant une mercerie, me semble, pourquoi vous avez disparu : dans une bagarre aux Halles (bien sûr), vous avez agressé quelqu’un, plusieurs peut-être, pour dépouiller les fringues, évacuer les colères. Vol en réunion avec violence, toi et l’autre, celui au long manteau, vous êtes enfermés, à Fleury précise-t-elle. Fleury, sans Mérogis, répète-t-elle (elle dira plus tard qu’elle connaît, qu’adolescente elle y a passé plusieurs mois – ou jours ? ou semaines ? – je ne saurai pas si c’est vrai), Fleury, oui, quartier des jeunes détenus, Franck n’a personne qui lui écrit est-ce que tu voudrais son adresse ?
 
Marcher quelques mètres de plus ?
 
Anne Savelli, Franck, Stock,  collection La Forêt, 2010, p. 42.
 
C’est la première mention du prénom, et ce retard en italiques évoque la gaucherie émouvante d’une première et pudique caresse.
Plus notamment sur ePagine (ici et ), Lignes de fuite, Pages à pages, et aussi dans les pages du dernier Matricule des Anges.



Commentaires

La littérature peut aider à désincarcérer. C'est sans doute l'un des effets de ce livre.
Commentaire n°1 posté par Dominique Hasselmann le 03/10/2010 à 09h30
Elle doit le pouvoir toujours - a fortiori quand c'est son sujet !
Réponse de PhA le 03/10/2010 à 11h17
très beau livre, trop dedans encore pour en dire quelque chose
Commentaire n°2 posté par petite racine le 03/10/2010 à 10h13
Complètement dedans aussi (et encore vers le début) : c'est pourquoi je n'en dis rien - ou presque.
Réponse de PhA le 03/10/2010 à 11h19
Merci beaucoup, Philippe, pour cette dernière phrase, si juste...
Commentaire n°3 posté par Anne Savelli le 03/10/2010 à 10h58
J'étais en pleine lecture, et elle s'est imposée comme une évidence.
Réponse de PhA le 03/10/2010 à 11h19
Très belle mise en avant du livre d'Anne Savelli. Et merci aussi pour les liens.
Commentaire n°4 posté par ChGrossi le 03/10/2010 à 11h09
C'est qu'ils méritent d'être visités !
Réponse de PhA le 03/10/2010 à 11h20
La littérature aide à désincarcérer ceux qui ne sont pas en prison.
Commentaire n°5 posté par albin le 03/10/2010 à 11h27
Absolument. C'est pour ça qu'on la vend en librairie.
Réponse de PhA le 03/10/2010 à 12h01
Et quelques mètres de plus, tout est encore fleuri.
Commentaire n°6 posté par Gilbert Pinna le 03/10/2010 à 16h30
Sans Mérogis, ce nom deviendrait presque un euphémisme au doux parfum. (Sauf que non : j'ai déjà entendu aussi "à Fleury", ce n'était pas vraiment un euphémisme.)
Réponse de PhA le 03/10/2010 à 17h32
"Franck n’a personne qui lui écrit est-ce que tu voudrais son adresse ? "... et votre " la gaucherie émouvante d’une première et pudique caresse. "complètement chavirantes ces deux phrases. Le livre doit l'être... (chavirant)
Puis je lis (là) :"Seuls la lettre, le courrier en eux-mêmes, la simple sensation de décacheter l’enveloppe et d’y voir je t’embrasse, tiens bon, comptent ici. On écrit parce qu’on n’envoie pas son corps par la poste, c’est tout." 
Il a l'air beau ce livre.
 
Commentaire n°7 posté par Ambre le 03/10/2010 à 21h14
C'est vrai, et pas que l'air.
Réponse de PhA le 03/10/2010 à 21h29
On écrit parce qu’on n’envoie pas son corps par la poste, c’est tout.
Ca c'est magnifique. Entre autres. Merci.
Commentaire n°8 posté par Moons le 03/10/2010 à 22h05
Eh bien merci à Anne Savelli !
Réponse de PhA le 03/10/2010 à 22h16

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