Nous transportons des livres et la police dit Bingo !
quand elle les trouve, et nous disons Bingo ! à son Bingo, parce que
nous tenons tous alors, police,
non-police, ce livre pour un Bingo – le Bingo de l’autre, si l’on
veut. Or, je ne suis pas sûre que le livre soit un Bingo ni une fête. Le
mode d’action d’un livre n’est pas binguiste ni
festif ; sa performativité spécifique n’est ni binguiste ni fictive.
Je sais bien que les livres qu’on remarque sont souvent conçus en
termes binguistes et pour produire un Bingo ! chez
le lecteur, l’éditeur, les médias et toute la chaîne-du-livre.
Autrefois – autre, autre, autrefois – j’aurais dit qu’en ce cas ces
livres sont des livres et non de la littérature ;
aujourd’hui, un livre de littérature bon peut se concevoir
binguiennement, tout replié sur lui pour produire l’élan typique qui le
projette en tête de gondole, et sidère les gondoles, et
dispatche les petits cœurs post-it scrupuleusement remplis par les
libraires d’adjectifs binguiens tels que jubilatoire, savoureux, etc.,
et tous ces mots culinaires avec lesquels en France on
décrit la littérature, et qui ne datent pas de Bernard Pivot, non,
Bernard n’a fait qu’entériner une habitude plus ancienne : j’ai lu les
mêmes adjectifs dans une série de fiches
pédagogiques destinées aux lycéens des années 60, qui décrivaient
indifféremment Colette, Paul Guth et Cholokov.
la police dit Bingo !, c’est ce qu’elle a fait en arrêtant* une « proche du groupe de Tarnac »
et en découvrant une caisse d’Insurrection qui vient dans le coffre de sa voiture.
* Et en lui plaquant un revolver sur la tempe (voir plus loin).
Nathalie Quintane, Tomates, p. 54 à 56, POL, 2010.
Dans ces Tomates il est notamment question de l’incarcération de Julien Coupat, des Jumelles de Pierre Alferi (cette histoire d’un révolutionnaire emprisonné qui se fait
baiser, dont j’ai déjà dit ou essayé de faire sentir tout le bien que j’en pensais),
de Lire
en fête, de livres, de littérature, de tomates. Leur rouge va bien à
notre humeur insurrective du moment (nous = Monsieur Le Comte et moi).
Allez donc sur Sitaudis lire les questions que vous vous posez déjà, ou sur Poézibao, ou sur le site de l’Humanité, où l’on peut écouter un autre passage que j’avais eu aussi envie de recopier
bêtement, comme je fais toujours.
(Et j'attends toujours que l'on me livre Monsieur le Comte sur un plateau d'argent! Beau titre non? Je suis entouré de paresseuses, c'est une honte!;)
Commentaire n°2 posté par Depluloin le 23/10/2010 à 11h03
(Mon bon seigneur, je risque de monter moi-même un de ces jours jusqu'à la capitale ; je vous adresse un pneumatique dès que la date sera fixée. Peut-être trouverons-nous un instant pour nous rencontrer, si nous ne sommes pas trop immatériels ce jour-là.)
Le lancer d'oeufs est également tombé en désuétude (il faut dire que la fermière a augmenté ses prix sur le marché et que le "bio" est réservé à un usage alimentaire.
Le lancer de cailloux (moins ambitieux que celui des pavés) est à la mode : sans doute des souvenirs inconscienst de ricochets sur l'eau d'un lac à Gérardmer ou Annecy.
Concernant Monsieur le Comte : il est toujours noté manquant sur le logiciel fournisseur de mon libraire, faut lui dire quand même qu'il nous manque effectivement, et qu'il faudrait qu'il se dépêche
Bravo.
(pardon, suis en période de "régression" "commentatrice")
Mea culpa, j'admets la punition.
Ces Tomates-là me paraissent en effet tout indiquées pour vos nerfs.
Un jour j'écrirai un livre binguiste, pour voir.