samedi 1 août 2009

dans une autre carafe

Une carafe contient un texte de Stendhal à la cou­leur jaune-marron. Cette page a une tête, l’ensemble évoque une poupée russe en bois. Stendhal l’écrivit dans les années 1825-1828 (?). L’autographe appar­tient à une jeune fille, fine exégète. Unissant la nature et la culture, le passé et le présent, le petit texte semble déplorer l’incapacité d’écrire un roman qui aurait le succès de ceux que Balzac publiera de 1830 à 1850. Stendhal survenu – sans la physionomie que nous lui connaissons (il ressemble à son style, non à lui-même) – réfute ma lecture : il aime mieux écrire cette page qu’un roman balzacien, il sera toujours temps de produire La Chartreuse de Parme (10 ans plus tard). Je transvase la page dans une autre carafe, en verre, où elle apparaît jaune ananas. Pendant les transvase­ments, la substance se perd. La jeune fille à laquelle je déclare qu’aujourd’hui les stendhaliens sont presque tous des jeunes filles, attirées par cette algèbre particu­lière, voudrait vendre le document dans une brocante.
 
Hubert Lucot, Allégement, POL, 2009, p. 81-82
 
Je lis le dernier livre d’Hubert Lucot.
Pour mon plaisir, j’isole le passage ci-dessus, n’en dis pas un mot.
 
« … le Neuf-Trois encore communiste et de loubards, où l’architecture sociale fait songer à la banlieue de Prague ou de Varsovie communistes… » (p. 67)
Mon œil de touriste s’était fait la réflexion strictement réciproque, ça me revient, en traversant la banlieue de Prague : ça ressemble à la Seine-Saint-Denis – qu’on n’appelait pas encore « Neuf-Trois » – où j’habitais et où je travaillais alors.
 
C’est toujours chez Lucot ce va-et-vient entre la sphère privée, intime même, et la sphère publique. En lisant les pages qui évoquent Sarkozy (j’hésite encore sur l’orthographe) je suis moins dedans, je sais pourquoi. Je me dis que c’est un mauvais sujet, en sachant bien qu’il n’y a pas de mauvais sujets, sauf aux yeux du roi.

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