dimanche 16 novembre 2025

Souvenirs de mon père, 55 (juste après la libération)

Quelques jours après, tu as repris ton vélo pour aller à Paris (il n’y avait plus de trains), à Boulevard Victor, pour t’engager, dans l’aviation. Après une visite médicale succincte au cours de laquelle ils ne se sont pas aperçus que tu avais fait une pleurésie un an auparavant, tu as été engagé. Mais il n’y avait pas de possibilité d’incorporation sur le moment. Ils t’ont dit de rentrer dans tes foyers et que tu viendrais pointer tous les mois, qu’ils t’incorporeraient quand ils pourraient.

Pour le ravitaillement, dans les jours qui ont suivi la Libération, ça été encore plus dur que sous l’Occupation. On ne trouvait plus rien à manger. Heureusement, à Gretz, ta sœur avait des amis qui travaillaient dans une ferme qui lui ont donné un sac de blé et un paquet d’oignons. Vous, dans le jardin, vous aviez plein de poires (il y avait de nombreux poiriers dans le jardin). Il vous restait aussi une couenne de lard. Tu as fait la cuisine à ta manière. Tu moulais le blé avec un moulin à café. Tu récupérais le son pour faire des crêpes au son dans une poêle que tu graissais vaguement en y frottant cette pauvre couenne de lard. Avec la farine, tu faisais du pain. Tu mettais un oignon à l’intérieur, ou une poire. Tu mettais ça au four, l’odeur et le goût de l’oignon ou de la poire imprégnait la pâte, et vous trouviez ça très bon. Et vous vous êtes nourris comme ça pendant six ou sept mois.



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