Monsieur Witz paraissait fébrile, très fébrile ; probablement Messerschmied l’avait-il pris par surprise en exigeant de lui ce rendez-vous express et néanmoins tardif : il faisait déjà presque nuit dehors et la plupart des employés de la société Brunnen avaient quitté les locaux. Messerschmied affectait un air pressé et intraitable, du moins c’est ce qu’il espérait ; c’était parce qu’il avait hâte que le contrat soit signé, depuis le temps que durait cette affaire ridicule. À moins que, et peut-être était-ce là la raison plus profonde de sa propre nervosité, qu’il tentait de cacher derrière son air autoritaire et pressé ; à moins qu’il ne fût surtout pressé de quitter les locaux de Brunnen. Il ne pouvait s’empêcher d’être sur ses gardes, comme s’il risquait véritablement quelque chose. Monsieur Witz, pendant ce temps, fouillait en vain des dossiers à la recherche du contrat, se décomposait devant la morgue affectée par Messerschmied, téléphonait à un collaborateur pour savoir où était la copie dudit contrat. Finalement Monsieur Witz se leva en s’excusant, ouvrit l’autre porte du bureau – Messerschmied ne put s’empêcher de penser « une porte dérobée », quoique cette porte n’eût rien que de très normal ; c’était là, selon Monsieur Witz, que son collaborateur avait rangé le contrat. Monsieur Witz disparut par l’ouverture, il y faisait très sombre ; Messerschmied ne put refouler une bouffée d’angoisse ; il se leva à son tour pour voir ce que faisait Monsieur Witz. Quand il entra dans la pièce, la lumière se fit d’un coup, et Messerschmied put voir une nuée de petits papiers déchirés se répandre dans l’espace tandis que Monsieur Witz se lamentait : c’était bien là le contrat.
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