J’ai aussi lu l’Énéide (car figurez-vous que je n’avais jamais lu l’Énéide – alors que depuis toujours l’Iliade et l’Odyssée me passionnent). Oserais-je le dire ? Je n’ai pas été emporté. Ça se lit toujours très bien, sans efforts ; mais autant les destins d’Achille, d’Hector, de Pâris, de Patrocle, de Diomède, d’Ulysse, me passionnent, autant celui d’Énée me laisse froid. C’est sans doute l’absence de défauts (certes Hector et Patrocle n’en ont pas tellement – mais au moins se battent-ils pour une cause qui n’est pas la leur), l’absence de failles. Énée est lisse. Je me demande bien ce que Didon a pu lui trouver. Ah oui, c’est à cause de Vénus. Je n’aime pas les divinités non plus, dans l’Énéide, Vénus et Junon en tête. Je n’y crois pas. Je les ai bien connus ; ils n’étaient pas comme ça, les vrais dieux. Je n’aime pas ce que Virgile en fait ; d’ailleurs il n’a pas tellement l’air d’y croire lui-même.
Bien sûr, je suis sans doute de mauvaise foi, comme tous les gauchistes. Car il y a sûrement des raisons politiques à mon rejet. Virgile écrit pour l’empereur, pour l’Empire. C’est d’ailleurs fait avec pas mal de subtilité, mais ça se sent. Même si l’Iliade et l’Odyssée s’adressent aussi à la noblesse de leur temps, l’humanité m’y paraît bien plus présente. Énée, c’est le modèle proposé aux Romains du début de l’empire. Récupération du mythe. Mais Virgile voulait brûler l’Énéide. Pour faire comme Kafka ? Alors, très certainement, elle vaut bien mieux que tout ce que je viens d’en dire.
(Et voilà que je suis pris d’une envie subite de lire la Mort de Virgile d’Hermann Broch.)
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