Si je vous lis de mon œil droit
c’est parce que j’y vois mieux encore pour lire qu’avec le gauche qui
pourtant se défend ; en
revanche si le gauche n’est que légèrement myope le droit à distance
a décidé, la quarantaine passée, de voir le monde flou – sauf quand (et
c’est très souvent que j’en fais l’expérience) je
joins les extrémités de mes deux pouces et de mes deux index et ne
laisse libre qu’un minuscule carré, un millimètre environ de côté, par
lequel une toute petite portion du monde d’un coup
revient à la netteté d’autrefois.
« voir
suppose une petite fissure et commencer à peindre exige de percer un
trou, un seul suffit pour faire
une passoire, à travers on regarde l’histoire, le monde ou son
reflet, son écran est une vitre sans tain, le tableau est une fenêtre
qui s’ouvre comme une orange. »
« Plus on regarde l’œil fixe et grand ouvert moins on voit, blanc sur blanc un gouffre libre ou noir sur noir
illimité, il se trouve sans doute quelque manigance là-dessous. »
« Le silence est différent de tous les autres silences, la lueur mate de toutes les autres lueurs, tire
carrément sur le violet comme avant une catastrophe, l’horizon change d’apparence et les sentiments s’éclipsent. Un jour j’inventerai un film en regardant le soleil, un film sur sa
méchanceté ou ses qualités sensibles – mais on n’en voit la
grandeur et la trame que lorsqu’il s’efface dans l’ombre portée de la
lune, quitte à y perdre la vue. »
Entre ces guillemets quelques toutes petites portions de Lazy Suzie, de Suzanne Doppelt, paru en novembre 2009 chez
POL, et dont Fabrice Thumerel et Alain
Nicolas vous donneront une idée moins floue.
J'aime bien les "portions" que vous avez sélectionnées, je vais aller voir plus avant ce que l'on dit de ce livre et de Suzanne Doppelt.
Merci Philippe.
lire LES YEUX, de Jean-Luc Parant.
On en ressort aveuglé, absolument.
Celui que je vois, là, regardez bien la couverture blanche avec cette étoile rouge et l'inscription "Rien de commun", est sous-titré : L'Envahissement des yeux.
C'est même un livre qui fait peur, on ferme les paupières.