Que fais-je dans mes Nouvelles notes sur les noms de la nature ? À peu près la même chose que dans le précédent volume (les deux peuvent néanmoins se lire indépendamment l’un de l’autre ; ce n’est pas une « suite ») : j’exploite mes connaissance en matière de zoologie, de botanique, de mycologie ; je fais donc mine de parler d’animaux, de plantes, de champignons – et en effet j’en parle vraiment, et tout ce que je dis est vérifiable – j’en parle et ne fais que mine d’en parler, car c’est en réalité pour traiter le seul sujet qui vaille à mes yeux en littérature, en poésie (car c’est là que je situe ce travail) : le rapport de l’homme, en tant que sujet parlant, au monde qui l’entoure, autrement dit : le langage. C’est à travers lui, avec ses mots d’occasion, que nous essayons de dire ce qui est. Dire ce qui est est en effet essentiel :
« Le nom donne à voir
ce qui nous échappait.
Depuis que je sais le nom
de l’accenteur mouchet
il y en a plein mon jardin. »
écrivais-je dans mes premières Notes. N’empêche : le langage est défaillant. Parfois, il raconte même n’importe quoi :
« Comme elle est originaire d’Amérique,
les Français la disent d’Inde
et les Anglais Turquie. »
(C’est dans mes Nouvelles notes – et son portrait par Florence Lelièvre est juste en dessous.) Or c’est là, ce me semble, dans cet écart entre ce que sont les choses – et notamment les organismes vivants dont nous sommes – et l’image mentale qu’en donnent les mots dont nous nous servons pour les désigner que se joue une possible poésie.
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