samedi 18 octobre 2014

Mon jeune grand-père (55)



Le 11 août 1917. Mes chers parents.
J’ai reçu pas mal de courrier ces jours-çi et je continue à recopier la même carte avec la même faute parce que si les cartes se ressemblent c’est parce que les jours se ressemblent, ce sont les cartes de Papa des 19-24.25.26 et 27 Juillet, une lettre de ma tante du 26 juillet et une carte de la cousine Adélaïde du 21 juin. Adélaïde. Non. C’est la première fois que je recopie ce prénom. Je suis bien content de savoir que tout le monde est en bonne santé et ne souffre pas des circonstances actuelles. L’euphémisme de circonstance. Je ne saurai jamais si Edmond avait une vraie tendance à l’euphémisme ou si il la doit à la conscience de la censure. La lettre de ma tante est comme toujours très affectueuse mais un peu triste. Dites-lui que je la remercie et que je l’embrasse bien fort. J’espère que Tante Marie aura fait un bon voyage, et que tout se passera sans incident. Tante Marie. La sœur de mon arrière-grand-mère. La marraine de mon père. Sans doute est-il la dernière personne à se souvenir d’elle. Il y a le souvenir de la personne, et puis après il y a le souvenir du souvenir. Dites à Geneviève que je lui souhaite bon voyage et bon amusement. J’espère qu’elle aura emporté son appareil et qu’elle m’enverra quelques épreuves. Je ne savais pas que Tata faisait de la photo, surtout à cette époque. Je ne sais pas grand-chose. Dites à la jeune Ninique (si je lis bien) que je la remercie et que je lui envoie aussi mon bon souvenir ainsi qu’à ses parents. Ce pauvre Louis n’a vraiment pas de chances avec ses permissions, on le fait toujours languir. Et toi, Edmond ? Quelle chance as-tu ? J’ai reçu le colis n°11 Voilà ta chance : tu as reçu le colis n°11. Qui va t’aider à manger et surtout te dire qu’il y a encore une place pour toi dans le monde ailleurs qu’à Posen. le dernier avant l’arrêt, il était en bon état. Nous ne savons pas comment arranger les haricots séchés. Vous aviez annoncé la recette, mais je ne l’ai trouvé dans aucune de vos lettres. Ça m’étonne quand même que Daussy ne sache pas arranger les haricots séchés. Après-demain ce sera le troisième anniversaire de mon départ de Saint-Quentin. C’est vrai que les Annocque étaient originaires de Saint-Quentin. Je n’ai jamais mis les pieds à Saint-Quentin. Je n’ai jamais eu de raisons d’aller à Saint-Quentin. Combien de temps me faudra-t-il encore attendre avant d’y rentrer et dans quel état la retrouverai-je ? Enfin ça sera peut-être plus tôt que nous ne le pensons. Quelle joie ce jour-là ! Mes chers parents je pense toujours bien à vous, et espère que vous ne vous ennuyez pas trop. Il n’a pas mis « de moi ». Et de quoi d’autre ? Je vous quitte en vous embrassant bien fort tous les deux ainsi que Geneviève et Louis, Madeleine et Jean, et toute la famille. Mes meilleures amitiés à tous les amis. Votre fils qui vous aime de tout son cœur. EAnnocque

1 commentaire:

  1. Eh bien, dis donc!
    Si jamais- personne ne le sait!- "grand-pere" peut te lire, j,espere qu,il a le sens de l,humour:-;
    (Daussy-cy- aussi!)

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