mercredi 20 novembre 2013

Mon jeune grand-père (17)

Le 12 février 1917 Mes chers parents
   Cette fois la crise est passée, j’ai reçu presque tous les colis en retard et D aussi, de sorte que nous revoilà d’aplomb. J’ai reçu les colis postes n° 19-20-5, le colis gare n°15 et un colis de pain du 13 janvier revenu à 2 kgs. Je ne comprends pas bien ce qu’il veut dire par « revenu », pourtant l’écriture est bien lisible ; je ne vois pas ce que ça peut être d’autre que « revenu ». Comme courrier j’ai reçu peu de chose, les cartes de papa du 25 et 30 ainsi qu’une carte de Thérèse qui est toujours en bonne santé ainsi que tous les siens. Nénette est maintenant une grande fille très gentille mais un peu polissonne qui cause très bien – Je vais un peu mieux mais je ne suis pas complètement guéri (apparemment ce tiret vaut pour un changement de paragraphe), je tousse encore un peu. C’est très difficile de se soigner quand on n’a rien. Et puis le temps n’est pas très favorable. Il y a de brusques écarts de température. Avant-hier il y avait – 24°, hier le thermomètre était remonté à 0°, aujourd’hui il est redescendu à – 15°. Jusqu’à présent il n’y avait pas beaucoup de malades mais depuis quelques jours il y en a plusieurs. Vous n’êtes pas mieux partagés paraît-il, nous avons vu dans les journaux qu’il avait fait – 15 à  Paris. J’espère que vous serez (« serez » surcharge un autre mot que je n’arrive pas à lire) et que vous n’attraperez personne de rhumes et que vous passerez l’hiver sans malaise.
Une fois encore, Edmond va à la ligne. Il a tout dit de ce qu’il y avait à dire. Il ne corrige pas ou ne voit pas ce qu’il y aurait à corriger dans sa dernière phrase, je le vois pris d’une quinte de toux qui l’arrête.
Je vous quitte mes chers parents en vous embrassant bien fort tous les deux ainsi que Geneviève et Louis, Madeleine et Jean et toute la famille. Votre fils qui vous aime de tout son cœur. La formule est tellement la même qu’il me suffit de la copier-coller. La banalité est terrible comme on dit mais si cette formule est toujours la même c’est que les sentiments et la situation aussi sont toujours les mêmes. Les mêmes. Les mêmes. Edmond

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