lundi 2 septembre 2013

Mon jeune grand-père (12)

Le 22 janvier 19167 - Mes chers parents. (Décidément toutes ces cartes de janvier portent cette difficulté à passer l’an. C’étaient des années qui ne passaient pas. Sur cette carte-ci l’article « Le » aussi est surchargé par un autre « Le », bizarrement. On a l’impression qu’Edmond a été interrompu au moment d’écrire – même si bien sûr ça n’explique pas vraiment cette correction d’un Le par un autre.)
C’est la crise des colis en ce moment. Ils n’arrivent pas et la réserve commence à être épuisée, car Daussy ne reçoit rien non plus. Je n’ai reçu que le colis poste n° 17. Je me demande quelle peut bien être la raison car il y en a qui les reçoivent régulièrement. Comme correspondance, j’ai reçu les cartes de papa des 8.9.10.12 et la lettre de maman du 7. Il fait toujours très froid en ce moment, il gèle très fort. J’ai bien reçu une fois des macarons, mais il y a très longtemps, c’était le 18 août et je crois en avoir accusé réception. Je n’en trouve pas trace dans les cartes que j’ai déjà recopiées, pourtant il y en a du mois d’août. Mais peut-être cette carte s’est-elle glissée ailleurs : j’ai conservé le relatif désordre dans lequel j’ai retrouvé ces cartes et dont je suis peut-être moi-même responsable. Ou peut-être a-t-elle été perdue. J’ai transmis au capitaine les renseignements il remercie bien papa du dérangement. On n’en saura pas plus. Vous êtes bien gentils de me donner des nouvelles de tout le monde. Je remercie tous les amis de leur bon souvenir _ (Les phrases toutes faites s’imposent d’elle-même, signes à la fois qu’il n’y a rien à dire et que dire est tout ce que qu’il y a à faire. Ce sont souvent ces phrases, dans leur terrible banalité, qui m’émeuvent le plus : « Vous êtes bien gentils de me donner des nouvelles de tout le monde. » Même l’évidence mérite d’être dite. Vous êtes bien gentils de me dire que le monde existe encore.) Je ne suis pas toujours l’emploi du temps que je vous ai donné dans ma dernière carte, car il y a des moments où je n’ai pas le goût de travailler alors je lis ; la bibliothèque est très bien montée et on n’a que l’embarras du choix. Je vous ai dit que c’était D qui fait la cuisine. (« Ai dit » et « c’était » surchargent d’autres lettres que je ne peux pas reconnaître.) Ms il ne faut pas croire que je ne fais rien c’est moi qui suis chargé du chocolat, thé, boissons et c’est moi qui met la table. (Je rends hommage à l’orthographe de mon jeune grand-père en recopiant cette faute – car c’est la seule.) Je vous quitte mes chers parents en vous embrassant bien fort tous les 2 ainsi que Geneviève et Louis et toute la famille. Votre fils qui vs aime de tt son cœur EA

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