dimanche 25 septembre 2011

"N’oubliez pas, Bal du rat mort dans un mois !"


Des plans sur la comète
 
Parfois, lorsque la pluie s’arrête quelques heures,
il arpente la ville et s’amuse à prononcer à haute voix
les inscriptions flamandes sur les panneaux.
Vlaanderenstraat, Torhoutsesteenweg, Wapenplein.
Des cochers gouailleurs font visiter la ville aux touristes.
Le bruit des sabots sur le pavé mouillé l’entraîne
dans les petites rues du centre.
Sur une gouttière, une affiche en français attire
son attention : « N’oubliez pas, Bal du rat mort
dans un mois ! » Dans un mois, il n’a aucune idée
de l’endroit où il sera.
 
 
Dieu, un bus et de la poussière rouge
 
Avant de partir, Thala lui a laissé l’adresse de la ferme
en Andalousie. « Que Dieu protège les hommes comme
toi », a-t-il dit. Sur le moment, Walther n’a pas vraiment
compris ce que Dieu venait faire dans cette histoire.
Un bus doit l’amener à Chaumont. De là il verra comment
descendre vers le sud. En prenant son ticket, il sent
que Pec a lâché une fiente chaude dans la poche
de son blouson. Il s’endort le front contre la vitre.
Dans son rêve la terre est rouge comme sur l’île de Gorée.
 
 
Le placard
 
Il lui aura fallu quatre bonnes heures pour se rendre
compte de son erreur. De longues prairies trempées
bordent la route. Le Chaumont dans lequel il débarque
est en Haute-Marne plutôt que dans le Nord. L’office
de tourisme en vante l’aqueduc romain et le fromage
de vache. Dans le café-commerce du coin, le grille-
mouche électrique au-dessus du comptoir est allumé
en permanence. En sirotant sa bière à petites gorgées,
Walther se dit que cette ville a été inventée pour y ranger
tout ce dont le reste du monde n’avait pas besoin.
 
Thomas Vinau,  Nos cheveux blanchiront avec nos yeux, Alma éditeur, 2011, p. 33-34.
 
Deux parties en miroir (« Le dehors du dedans… » / « Le dedans du dehors… »). La première à la 3e personne pour suivre Walther qui ne sait pas où il va parce que la nécessité c’est simplement d’aller, la deuxième à la 1ère personne où le narrateur désormais innommé, de retour chez lui pour la naissance de son fils, est maintenant immobile. Equilibriste entre deux genres, en posant ses bagages le romancier redevient poète.



Commentaires

Merci philippe !
Commentaire n°1 posté par thoams le 26/09/2011 à 10h42
Un plaisir. (Dernier achat de mes vacances normandes.)
Réponse de PhA le 26/09/2011 à 16h10
J'ai l'impression que j'ai comme un rendez-vous.
Commentaire n°2 posté par tor-ups le 27/09/2011 à 09h59
On en parle à Souricette ?
Réponse de PhA le 28/09/2011 à 14h06

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire