jeudi 21 mai 2015

Dits des xhuxha’i



The Black Herald n’est pas qu’une revue, c’est aussi – ou plutôt Black Herald Press est aussi – une maison d’édition, pareillement de noir vêtue, et où je viens de lire les Dits des xhuxha’i, (ou encore Tales of the xhuxha’i, car l’édition comme la revue est bilingue), recueil de vingt-deux poèmes d’Anne-Sylvie Salzman. On y est à la fois loin et proche des Dernières Nouvelles d’Œsthrénie, du même auteur comme on dit, rappelez-vous. Apparemment loin par l’épaisseur de l’objet, cette fois très mince, et par le genre, poétique. Encore que. Les Dernières Nouvelles d’Œsthrénie étaient un roman qui était aussi autre chose, une manière de géographie et d’Histoire fictive, qui donnait chair et sang à tout un peuple, lequel se mettait à vivre (et encore davantage à mourir) sous nos yeux. Or ces Dits des xhuxha’i, ces poèmes comme je les ai un peu vite appelés (eux-mêmes se disent « chants », « contes » ou « malédictions »), sont signés Anne-Sylvie Salzman à la manière dont les Dernières Nouvelles d’Œsthrénie sont signés Anne-Sylvie Salzman : avec le plus grand effacement possible de l’auteur même. C’est aussi à un peuple que la parole est donnée, et là encore le mythe est en marche. D’ailleurs l’envie traverserait bien l’esprit d’interroger l’oracle Google sur l’existence de ces xhuxha’i comme sur celle de l’Œsthrénie, et l’on trouverait en effet quelque chose, puisque les remerciements à la fin du recueil nous informent que ces femmes dont les voix d’Anne-Sylvie Salzman disent l’origine et la fin doivent leur existence à « 22 dessins au sang menstruel et à la mine de plomb de Lmg Névroplasticienne », « on peut voir ces œuvres en ligne à l’adresse suivante : http://lmg-nevroplasticienne.com/?page_id=4613 » (l’avantage de recopier ça ici c’est qu’il ne vous reste plus qu’à cliquer). Mais seule une citation vous dira ce que ces textes ont d’essentiel :







VII. (chant xhuxha’i)





Trois jambes : oh, j’ai trois jambes, mon aimé : un chien m’a prise.

Un chien, un cheval que je croyais homme.

Un sanglier.

Un serpent.



Où es-tu, aimé ?

Je te cherche dans la vallée.

Tes cheveux sont noirs.



Je te tresse trois cornes

avec mon sang.





Anne-Sylvie Salzman, Dits des xhuxha’i, Black Herald Press, 2015, p. 20.

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