Je suis fier comme
Artaban : je ne suis pas cité dans le dernier livre d'Eric
Chevillard. J'ai nommé : Défense de Prosper Brouillon.
Rappelez-vous :
pendant six ans, six années merveilleuses, Chevillard a tenu sa
chronique littéraire au Monde des Livres. Et puis, il y a peu, il a
jeté l'éponge. Désespoir dans les foyers. Heureusement Claro a
pris la suite, on peut lui faire confiance.
Et l'on peut comprendre
Chevillard. Il a dû s'en farcir, des horreurs. Mais dans un souci
très clairement écologique, voici qu'il nous en sort Défense de
Prosper Brouillon ! Soucieux de ne rien laisser perdre,
Chevillard fait bien mieux qu'y recycler ses propres chroniques
(comme aurait fait par exemple un Patrick Besson) ; ce qu'il
nous ressert, ce sont les phrases les plus ridicules de nos plus
ridicules auteurs à succès du moment et qui, attribuées à ce
Prosper Brouillon qui les incarne tous et toutes, trouvent soudain un
éclat inespéré. Garanties authentiques, elles sont pourtant
méconnaissables. Des phrases telles que « On n'entendait pas
siffler le passage du temps », « Le visage de la jeune
femme se précisa et lui empoigna l'âme » ou dans la même
veine néo-romantique « Une fille, ça s'ouvre et ça se
ferme : le problème est de trouver le bon mot de passe »
deviennent les clés de voûte d'une authentique œuvre littéraire ;
on ne pouvait pas trouver à de telles perles meilleur défenseur que
le narrateur de Défense de Prosper Brouillon. Les voici enfin
dans un livre qui vaut vraiment quelque chose ; et il y a au
fond une sorte de paradoxe dans cette attaque déguisé en défense :
les auteurs sont (anonymement, on n'est pas cruel) condamnés mais au
moins leurs pires phrases sont sauvées.
Défense de Prosper
Brouillon est illustré par
Jean-François Martin qui illustrait la chronique d'Eric Chevillard
au Monde des Livres et publié par les éditions Notabilia.
Je viens de clore le dernier chapitre de cette « Défense de Prosper Brouillon » et je ne reviendrai pas sur le "génialissime" talent (celui là bien réel !) d’Eric Chevillard ni sur celui de Jean François Martin, qui ne l’est pas moins (génial et talentueux) et de ces illustrations qui font de ce livre un livre précieux. Evidemment ce livre est excellent et heureusement, comme nous le précise fort justement Eric Chevillard en note de fin d’ouvrage : « La littérature contemporaine (…) compte aussi par bonheur de très beaux écrivains, plus nombreux certainement qu’on ne le croit. » Et c’est rassurant car dans ces citations de « tête de… gondole », tant de vulgarité, d’indigence, de médiocrité, de nullité, de poncifs éculés, de mièvrerie nauséabonde… cela m’a vraiment beaucoup amusé, mais donné la nausée aussi, puis révolté… Heureusement, donc, qu’il existe des écrivains et des livres. Des vrais. Et des libraires (à défendre) pour les défendre !
RépondreSupprimerJe ne devrais pas, mais comme cette chronique tombée un 13 novembre 2015 est passée aux oubliettes pour les raisons dont hélas on se souvient, j'ose la la poster de nouveau ici : http://www.quidamediteur.com/content/1-catalogue/1-made-in-europe/20151020-pas-liev/chevillard-pasliev.png
SupprimerEt tu as plus que raison de remettre ce lien en valeur: ton Liev est remarquable.
RépondreSupprimerMerci !
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