mardi 30 juin 2015

« Jésus est dans ma bouche. »



Écartant alors ses mâchoires et ramenant entre pouce et index sa lippe vers sa barbiche elle découvrit, rompant seule la monotonie des gencives, une canine longue, jaune et profondément déchaussée, taillée à représenter le célèbre sacrifice, à la fraise probablement. Je la brosse cinq fois par jour, dit-elle, une fois pour chaque blessure. De l’index de sa main libre elle la tâta. Elle branle, dit-elle, j’ai peur de me réveiller un de ces quatre matins en l’ayant avalée, je ferais mieux de la faire arracher. Elle lâcha sa lippe qui reprit instantanément sa place avec un bruit de battoir.



Samuel Beckett, Malone meurt.


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