Dans mon oreille, illustré par Henri Galeron, Editions Motus, 2013.
Echos :
- Article d'IRIS (avril 2014)
- Article dans le n°58 de la revue Poésie Première :
Dès qu’on ouvre le livre, on est saisi par la
beauté des images et on se met à jouer avec les lettres des distiques. On
s’amuse à repérer le mot qui va surgir à la deuxième ligne toujours dans la
surprise : « LÀ HAUT ? UN FUNAMBULE
ÉCRIT/LA FABLE DE L’AIR. » - « CONTRE
LES CRIS SOUS LA TORTURE ? / L ÉCRITURE »
– Avec malice, l’illustrateur (8 livres chez MØtus et chez bien d’autres
éditeurs encore … Nominé pour le prix Andersen en 2012) met en scène la
légèreté et la gravité de la vie évoquée par les distiques. L’auteur qui
préfère « les jeux sur les mots aux jeux des maux fictifs »
incite ainsi les lecteurs à devenir à leur tour auteur de trouvailles
poétiques. Plaisir jubilatoire dans chaque page et si « DANS MON OREILLE/
JE CACHE MON ŒIL » que m’arrivera-t-il ?
« Alors on joue ? » lançait Breton à la cantonade
alors qu’il risquait sa vie dans un engagement antinazi. Le jeu n’est pas
simple divertissement mais une façon de vivre à laquelle invite ce beau livre. - Billet sur la Mare aux mots, Par Marianne (7 janvier 2014)
- Article dans Ricochet-Jeunes, par Valérie Meylan
- Article dans Lisez jeunesse, par Philippe Geneste (22 décembre 2013)
Annocque Philippe, Dans
mon oreille, illustrations d’Henri Galeron, MØtus, 2013, 72 p.
12€
L’ouvrage est un exercice
anagrammatique. Afin de ne pas perdre l’enfant, les lettres en gras dans la
première partie du texte explicitent le mot employé en fin de texte. Les
illustrations d’Henri Galeron relèvent du registre surréaliste tant au niveau
du dessin que de la peinture. Les textes d’Annocque sont simples. Ils se
laissent porter par l’imaginaire des sons et des lettres. Surviennent alors des
sens inouïs qui imposent une vision étrange des choses et des situations que
les illustrations de Galeron viennent renforcer par leur interprétation de
grande liberté.
A l’heure où les imaginaires
enfantins sont hachés menus par l’impérialisme des images sur écran, à l’heure
où les expériences en écriture des enfants montrent un étrécissement de
l’exploration imaginaire du monde au profit de représentations autocentrées, ce
genre d’ouvrage prend une dimension d’utilité humaine. Sortir de soi implique
de s’ouvrir aux autres et s’ouvrir aux autres signifient permettre à son
langage d’éclore à l’air libre de l’expérience.
C’est que l’anagramme permet une
lecture souterraine du monde, des relations aux êtres et aux choses. Il permet
l’accès, comme Henri Galeron le laisse paraître, à l’inconscient.
La règle de construction que
s’est imposée Annocque l’amène souvent à proposer des aphorismes loufoques, des
maximes décalées, des mots d’esprit incongrus, voire des calembours. Le sourire
s’esquisse à cet humour sans emphase. C’est qu’on ne construit pas l’amour de
la langue chez l’enfant à partir de règles et de lectures superficielles :
il y faut la lenteur d’un moment de langue. Il n’y a point d’instantanéité pour
que naisse l’amour des mots, il y faut une pratique, une expérience. Et
justement, le livre d’Annocque et Galeron permettent de faire cette expérience,
en imposant par le texte une attention aux lettres qui le composent et en
imposant par l'image à rechercher la relation que texte et illustration
entretiennent.
Nous ne pouvons qu’espérer être
entendu : Dans mon oreille est un ouvrage de déstéréotypage,
un livre qui donne des ailes pour oser dire après s’être nourri d’un lire qui
délivre les mots de leur sens unique. Un sens unique interdit toujours au moins
un autre sens… Dans mon oreille est un recueil poétique
contre la censure et l’autocensure. C’est un recueil pour l’émancipation des
mots et donc de soi.
Geneste Philippe
- Article dans les notes bibliographiques de Bibliothèque pour tous :
- Article dans la revue InterCDI, numéro de novembre-décembre (cliquez sur l'image pour lire) :
- Article dans la revue des livres pour enfants sélection 2013 :
- Annocque prend l'avion par les ailes, article sur la Marche aux pages, par Fiolof (30 novembre 2013)
On aime bien les livres de Philippe Annocque.
Alors, bien sûr, depuis Monsieur Le Comte au pied de la lettre, on
attendait le prochain. Et voilà que l’auteur nous revient avec 180 mots
seulement. D’accord, il y en a 33 autres cachés dedans, mais ça ne fait
rien, les lecteurs qui aiment sa prose pourraient trouver ça un peu chiche...
Qu’ils se rassurent, avec Dans mon oreille, récemment paru aux
éditions Motus,
l'économie de moyens n'empiète pas sur la saveur. D’autant que Philippe
Annocque s’expose cette fois avec un bel acolyte, l'illustrateur Henri Galeron.
Dans mon oreille entre
dans la catégorie des livres de jeunesse (vous savez, ces livres que l’on offre
parfois à nos enfants en espérant qu’ils nous laisseront les lire…) et
fonctionne autour du principe de l’avion. L’avion est l’une
des contraintes recensées par l'Oulipo
et figure, c’était imparable, entre l’ avalanche
et le baobab
dans la liste alphabétique desdites. Un avion,
c’est une "abréviation de mots", nous annonce un peu
succinctement l’Oulipo. Le choix de ce terme pour désigner la chose vient de ce
qu’il est lui-même, comme, on peut le voir, une ABREVIATION avionnée…
Ce qui est touchant, c’est que Philippe
Annocque (il en parle sur son blog) ne s’est pas assis à sa table de travail en se
disant soudain «tiens, je vais faire l’oulipien». Les choses se sont passées
autrement : la contrainte lui est pour ainsi dire venue par voie naturelle… Il
a un jour découvert qu’il y avait un ŒIL dans son OREILLE
et, ce qui est nécessairement une bonne nouvelle pour quelqu’un qui les aime,
des mots dans les mots…
L’avionnique bien comprise
est donc un art de la surimpression ; faire des avions
c’est (r)écrire en gommant, pour donner à lire d’autres mots dans les
mots, d’autres textes dans les textes. Bien sûr me direz-vous, le nombre de
lettres n’étant pas infini, plus le texte source est vaste et plus il sera
potentiellement farci d’avions. On est à peu près sûr de pouvoir
retrouver un certain nombre de fois dans le bon ordre les mots Guerre
et Paix dans le roman de Tolstoï ou, pour envisager
un biais plus désappointant, de pouvoir déceler au moins une courte
citation de Beckett dans chaque roman d’Alexandre
Jardin. Autant dire que pour qu’un avion ait une chance de
franchir le mur du son, mieux vaut que l’engin traverse un concentré de ciel…
Et c’est exactement ce qui se
produit ici, puisque le mot caché nous est à chaque fois servi par un distique,
une forme resserrée qui le met sensiblement en relief.
LA-HAUT, UN FUNAMBULE
ECRIT
LA FABLE DE L’AIR.
Et bien sûr ces petits précipités
poétiques, à mi-chemin entre morale balbutiée et bonsaï de haïku, au-delà de
leur dimension ludique, crépitent aussi du côté du sens. Ça fait feu, ça
rapproche, ça creuse ou ça ouvre, ça grésille… Il y a parfois de vraies
trouvailles, drôles ou émouvantes, à mastiquer ou à méditer.
UN POMMIER
PENSIF
DONNAIT DES POIRES
Et il y en a bien d’autres, qu’il
serait dommage de déflorer en dehors du livre, d’autant que les illustrations
délicates de Henri Galeron composent souvent d'intéressantes
propositions avec les textes. Il n’a pas dû être simple pour ce dernier, on
peut l’imaginer, de s’inscrire dans ce cadre contraint tout en y apportant une
touche qui ne soit pas seulement redondante. Et c’est pourtant joliment réussi -
poétique, décalé, inventif.
Dans mon oreille est un
beau livre, on l'aura compris.
Mais est-ce bien suffisant ?
Car par les temps qui courent, un juste souci de rentabilité éducative agite
tout parent qui se respecte. Et chacun est en droit de se demander, avant
d'offrir l'ouvrage à sa descendance, quelle leçon elle pourra en tirer.
J’en vois au moins une : pour
éviter le pire et butiner le meilleur, rien de tel que d’ouvrir toujours grand
les mirettes.
Philippe Annocque, Henri
Galeron, Dans mon oreille. Editions Motus. 2013.
- Article dans le numéro de novembre 2013 de la Tartine.
- Article dans le numéro de novembre 2013 du Journal de l'animation.
- Dans mon oreille sur Choisir un livre, octobre 2013.
- "Un livre coup de coeur" pour Alain Boudet (La Toile de l'un), octobre 2013.
Voilà de courts textes proches de l'aphorisme, du
dicton. Deux lignes dont le sens s'articule autour d'un jeu. Certaines lettres
des mots de la première ligne composent un mot qui est la clé de la seconde, et
par là, du texte entier. Un jeu bien sûr, mais intelligent, qui éveille
l'attention, suscite la curiosité et avive l'intérêt. Une réelle invention, des
surprises sans facilité que cisèlent les dessins oniriques et surréalistes en
couleurs d'Henri Galeron.
(Alain Boudet) - Présentation sur Opalivre, pour la promotion du livre jeunesse.
- Dans mon oreille est "magique" sur Dis-moi-dix-mots.
- "Et puis un jour, dans mon oreille, je trouve mon oeil", article de Sissi sur Critiques Libres, 18 septembre 2013.
- L100 vole à bord d'un avion oulipien piloté par Annocque et Galeron, article de Lucie Cauwe, sur Lu cie & coe, 17 septembre 2013, repris dans le n° 112 de la revue L'IBBY LIT (revue belge de la littérature jeunesse) dans la rubrique coup de coeur de Lucie Cauwe (novembre-décembre 2013)
Regardez bien: dans "oreille", il y a les quatre lettres du mot "œil". Et dans le bon ordre, je vous prie! C'est ce que l'OULIPO (Ouvroir de littérature potentielle) appelle un "avion" (invention de Michelle Grangaud). "Avion est une abrévation du mot abréviation", explique-t-elle dans "Une bibliothèque en avion" (La bibliothèque Oulipienne n° 115). "L'abrévation du mot abréviation sous la forme avion est un mot dans le mot."
On savait qu'un train peut en cacher un autre, voilà qu'on
va savourer des mots cachés dans d'autres mots, avec toutes les collisions de
sens ou les renforcements ou les évasions que cela peut supposer.
Cette contrainte oulipienne de l'avion régit
l'album "Dans mon oreille" (Motus, 72 p.). Un ouvrage né de la
bonne entente d'un duo mixte: Philippe Annocque, qui écrit pour la première
fois pour les enfants, et Henri Galeron, ce merveilleux vieux routier de la
littérature de jeunesse.
L'album à l'italienne se base sur le rapport qui s'établit entre le texte, un distique où les lettres jouent à cache-cache entre elles, et l'image prolongeant ou faisant obliquer le texte toujours écrit en lettres capitales. C'est un peu difficile à expliquer mais paraît évident quand on ouvre le livre. Pages de dessin et de texte se répondent, conversent, dialoguent.
Quelques exemples. (Voir les illustrations correspondantes sur Lu cie & coe)
L'album à l'italienne se base sur le rapport qui s'établit entre le texte, un distique où les lettres jouent à cache-cache entre elles, et l'image prolongeant ou faisant obliquer le texte toujours écrit en lettres capitales. C'est un peu difficile à expliquer mais paraît évident quand on ouvre le livre. Pages de dessin et de texte se répondent, conversent, dialoguent.
Quelques exemples. (Voir les illustrations correspondantes sur Lu cie & coe)
"L'ÂME DE MA MARIONNETTE?
C'EST MA MAIN."
"SUR LES AILES DU PAPILLON,
LA QUEUE DU PAON."
"DANS MON COQUILLAGE,
IL Y EN A MILLE."
"LE PRISONNIER, LA HAUTE FENÊTRE
ET LE SON DE LA FÊTE."
Toutes ces petites phrases sont indépendantes les unes des autres, même si on peut en relier certaines. Elles touchent à tous les domaines, l'émotion, la rire, la poésie, le sens de la vie. Des trouvailles réjouissantes, oulipiennes, qui font sourire ou rire, qui font surtout reculer le champ du réel. Des tremplins pour l'imaginaire, dont les ressorts sont encore plus tendus par les merveilleuses images de Henri Galeron. On retrouve dans ses dessins à l'aquarelle et aux crayons de couleurs son goût pour l'humour et le non sense, son amour du détail le plus infime, sa palette de coloris lumineux.
Ecrire en effaçant
L'"avion" permet d'écrire en effaçant, s'amuse Philippe
Annocque, de voir des mots qu'on ne voyait pas avant. L'écrivain a
ainsi découvert qu'il avait un œil dans l'oreille mais vl'ignorait. Par contre,
il tenait l'idée d'un livre pour tous les publics, son rêve. "Je vois
venir une série de distiques, très simples, explique l'auteur sur son blog, qui me disent des choses que
je n'avais pas vues. Ce ne seront plus des avions au sens strict du terme, peu
importe. Il faut que ça me parle. Que me parlent les mots à l'intérieur des
mots pour voir s'ils ont vraiment quelque chose à me dire. Je creuse un peu la
question: j'ai l’impression que oui."
Dessiner au plus près du sujet
Ecrire, c'est bien, publier, c'est mieux. Aux éditions
Motus? Contactées par mail par Philippe Annocque, elles marquent leur accord.
Et ses distiques sont confiés à Henri Galeron. Ce n'est pas
une contrainte oulipienne qui va effrayer l'illustrateur des "Poèmes sans
queue ni tête" du génial Edward Lear (traduits et adaptés par François
David, Motus, 2004). Quelle réussite que cette association! Car bien sûr, Henri
Galeron suit la ligne de la phrase mais à sa manière, en la rendant encore plus
forte ou en lui ouvrant d'autres possibles.
Pour reprendre nos exemples: les maisons derrière l’œil et l'oreille, les personnages masculins et féminins qui prolongent les mains-marionnettes, l'absorption du papillon par le paon à moins que ce ne soit l'inverse, le coquillage qui invite chez lui non pas Vénus mais une mer et son paquebot, sans oublier cette formidable idée des yeux derrière les barreaux d'une prison.
Et on vous laisse imaginer le pommier qui donne des poires, l'arbitre qui confond sifflet et arbre, le ciel de plomb qui menace une maison illuminée. On retrouve avec plaisir les thèmes graphiques chers à Henri Galeron (en voir davantage sur son site personnel), les ponts qui s'envolent, les hommes en haut de forme, le peintre et sa toile, les contre-sens logiques comme dans la dernière double page où un homme en manteau qui a la tête dans un sens et les pieds dans l'autre porte une valise de forme humaine: "DANS MA VALISE, J'EMPORTE MA VIE."
"Dans mon oreille" est vraiment un album pour tous, enfants et grandes personnes. Il demande du travail à son lecteur mais le récompense d'une solide et très amusante séance de remue-méninges.
Pour reprendre nos exemples: les maisons derrière l’œil et l'oreille, les personnages masculins et féminins qui prolongent les mains-marionnettes, l'absorption du papillon par le paon à moins que ce ne soit l'inverse, le coquillage qui invite chez lui non pas Vénus mais une mer et son paquebot, sans oublier cette formidable idée des yeux derrière les barreaux d'une prison.
Et on vous laisse imaginer le pommier qui donne des poires, l'arbitre qui confond sifflet et arbre, le ciel de plomb qui menace une maison illuminée. On retrouve avec plaisir les thèmes graphiques chers à Henri Galeron (en voir davantage sur son site personnel), les ponts qui s'envolent, les hommes en haut de forme, le peintre et sa toile, les contre-sens logiques comme dans la dernière double page où un homme en manteau qui a la tête dans un sens et les pieds dans l'autre porte une valise de forme humaine: "DANS MA VALISE, J'EMPORTE MA VIE."
"Dans mon oreille" est vraiment un album pour tous, enfants et grandes personnes. Il demande du travail à son lecteur mais le récompense d'une solide et très amusante séance de remue-méninges.
- Article de Daniel Brugès, dans le Réveil Cantalien, 13 septembre 2013 :
(Cliquez à tout hasard, vous verrez peut-être mieux.)
- Article de Brigitte Aubonnet sur Encres vagabondes, 7 septembre 2013 :
Philippe Annocque et Henri Galeron
Dans mon oreille
Les oreilles nous permettent de percevoir le monde mais si l'on s'autorise à l'entendre et aussi à le voir autrement, c'est le bonheur assuré. Voilà ce que nous proposent l'auteur et l'illustrateur de ce livre. Un jeu très amusant consiste à découvrir dans les mots d'autres mots qui y sont insérés. Comme l'archéologue qui découvre un objet en balayant la terre autour de fragments qu'il n'identifie pas encore, de nouveaux mots se dégagent.
En caractère gras apparaissent, bien ordonnées, les lettres qui constituent un nouveau mot.
"Dans mon oreille je cache mon œil."
"L'âme de ma marionnette ? C'est ma main."
"Un pommier pensif donnait des poires."
Des trouvailles étonnantes et poétiques au cœur des mots pour amener à
réfléchir sur ce que contiennent les mots, sur ce qu'ils peuvent créer par
eux-mêmes sous la plume d'un auteur inventif. "L'âme de ma marionnette ? C'est ma main."
"Un pommier pensif donnait des poires."
Du jeu mais de la réflexion aussi sur des sujets graves :
"Contre les cris sous la torture, l'écriture."
Les illustrations créent aussi un univers de rêve, d'humour ou de
méditation.Un très bel objet, un livre à lire avec des enfants pour découvrir avec eux le plaisir des mots et leur infinie richesse.