L'art est nié quand sa
toile est une croûte.
vendredi 28 juin 2019
jeudi 27 juin 2019
mardi 25 juin 2019
lundi 24 juin 2019
dimanche 23 juin 2019
jeudi 20 juin 2019
mercredi 19 juin 2019
mardi 18 juin 2019
Brèves animales (13)
C’est quand les bois du
cerf tombent qu’il les quitte pour le désert dont deux dunes
désormais gonflent le dos de ce chameau.
lundi 17 juin 2019
dimanche 16 juin 2019
samedi 15 juin 2019
vendredi 14 juin 2019
jeudi 13 juin 2019
mercredi 12 juin 2019
Brèves animales (7)
Épris de simplicité, le
serpent serpente et le lézard lézarde tandis que, dans sa
maladroite et innocente tentative pour les imiter, le crocodile
croque Odile.
mardi 11 juin 2019
Brèves animales (6)
La rhamphothèque est le
tégument corné du bec, elle permet à l'oiseau d'oublier qu'il
tombe aussi sur un os lorsqu'il tombe sur un bec.
dimanche 9 juin 2019
Brèves animales (5)
Le bec du toucan est si
gros qu'au moins il sait que c'est surtout sur le sien qu'il risque
de tomber.
samedi 8 juin 2019
jeudi 6 juin 2019
mercredi 5 juin 2019
mardi 4 juin 2019
lundi 3 juin 2019
Petites nausées (5 et dernière)
(Vers Petites nausées 1, Petites nausées 2, Petites nausées 3, Petites nausées 4)
Cette
sensation m’est familière, si discrète qu’elle ait su se faire.
J’ai parlé des boutons (et autres petits objets à prendre entre
les doigts), j’ai parlé de Renoir ; en réalité, je pourrais
bien la retrouver ailleurs. Pour preuve : dès que j’imagine
de répertorier, de mettre en liste les causes diverses de mes
dégoûts irrationnels, une autre à l’instant se présente à mon
esprit, dans toute son écœurante évidence : mon prénom.
Là
encore, dire avec précision ce qui se passe n’est pas facile. Un
improbable lecteur se fourvoiera sans doute dans ses interprétations,
à cause de ma propre incapacité à discerner l’essentiel.
Mon
prénom est un prénom courant. Je suis même obligé de le
préciser : c’est un prénom vraiment très commun, tout au
moins dans ma génération ; il paraît même que ce fut le
prénom masculin le plus donné en France l’année de ma naissance.
Mais
déjà je regrette presque ces précisions, honnêtes, objectives
tout au moins, mais qui ne disent rien de ce que je ressens, et qui
risquent d’induire une fausse piste : prénom commun, trop
commun, qui n’est plus un nom propre, qui à la limite usurpe sa
majuscule, ne la mérite pas.
Il
ne s’agit pas de ça.
Il
ne s’agit pas davantage du prénom lui-même, de ses sonorités ;
pas davantage de quelque éventuel prédécesseur, qui l’aurait
porté avant moi et entaché d’une souillure indélébile ou
auréolé d’un prestige exorbitant. Non, disons les choses
clairement : que ce soit « Philippe » n’a rien à
voir là-dedans. Je ne trouve pas ce prénom plus vilain qu’un
autre. Ç’aurait été Patrick ou Alain ou Eric, ç’aurait été
exactement pareil.
En
réalité, ce n’est pas vraiment « Philippe » ;
c’est juste que moi, je sois « Philippe ». C’est
un peu comme si j’étais obligé de porter des vêtements
d’emprunt. (J’ai toujours détesté enfiler des vêtements
d’emprunt. Dégoût, encore. D’autres, j’imagine, me
comprendront.) « Philippe », ce n’est pas moi. Parfois,
dans la conversation, il arrive qu’on m’appelle « Philippe »,
sans que ce soit vraiment nécessaire ; qu’on utilise ce mot
un peu à la manière d’un signe de ponctuation. « Ne
m’appelez pas « Philippe », suis-je alors tenté de
dire à mon interlocuteur. » Mais lui, forcément :
« Comment voulez-vous que je vous appelle ? Vous vous
appelez bien Philippe ! » « Ne m’appelez pas. »
Ce
serait inconvenant, je m’en rends bien compte. C’est pourquoi, la
plupart du temps, je me laisse appeler « Philippe ».
Qu’en
dire ? Il me semble, mais je peux me tromper, que les choses
auraient été atténuées, non pas annulées mais simplement
atténuées si mon prénom avait été plus court (plus proche de
rien) ; et qu’elles auraient été aggravées s’il
avait été plus long. Mais je n’en suis pas sûr. Ou plutôt :
il y a sûrement du vrai là-dedans, mais les choses ne sont pas si
simples.
Parfois,
souvent même, je dois le reconnaître, « Philippe »
passe inaperçu. Pour peu que son emploi soit vraiment justifié,
indiscutable, je ne le remarque plus. Ce n’est qu’en forçant ma
mémoire que je me rends compte que tiens ! on m’a appelé
« Philippe », et que, curieusement, je n’ai pas
bronché. Comme, évidemment, il est rare que je force ma mémoire
sur ce sujet ; il est très probable que de nombreux
« Philippe » passent ainsi à l’oubliette, comme les
boutons de ma braguette ou les reproductions des peintures de Renoir
dans les manuels scolaires.
Mais
d’autres fois – les fois qui comptent –, au moment où,
effectivement, on m’appelle « Philippe », je me sens
appelé « Philippe ». Et voilà, je dois donc être
« Philippe » ! je dois incarner
« Philippe » ! Je n’en ai pas le choix, on vient
de me sommer de l’être. Je n’ai plus qu’à me conformer :
« Philippe », c’est moi.
dimanche 2 juin 2019
Petites nausées (4)
(Vers Petites nausées 1, Petites nausées 2, Petites nausées 3)
Mais c’est donc que, dans les deux cas, face au bouton, face au tableau de Renoir, je suis tenté de penser à quelque chose (quelque chose à quoi les autres, a priori, ne penseraient pas), que seule la volonté m’a appris à occulter.
Mais c’est donc que, dans les deux cas, face au bouton, face au tableau de Renoir, je suis tenté de penser à quelque chose (quelque chose à quoi les autres, a priori, ne penseraient pas), que seule la volonté m’a appris à occulter.
Face
au bouton, il y a cette conscience nauséeuse qu’il s’agit d’un
objet manufacturé, de petite taille, destiné à être pris
entre les doigts.
Face
au tableau de Renoir, cette espèce de flou fuyant écœurant, de
flou en mouvement (mouvements contradictoires, quasi tiraillement ;
mais ce n’est pas cela, non vraiment ce n’est pas cela) ;
cela même qui me permet de reconnaître à coup sûr Renoir –
et de n’éprouver aucune répulsion devant l’œuvre médiocre
d’un pâle imitateur.
Peut-être
faut-il dire aussi (j’en suis moins certain, mais tout de même je
le dis, par honnêteté : parce qu’on ne sait jamais)
que le bouton, aussi, par sa petite taille, est susceptible d’être
improprement porté à la bouche, notamment par un jeune
enfant.
Le
mal nommé flou fuyant de Renoir me suggère peut-être avec trop de
violence que les choses ne peuvent pas demeurer en l’état. (Mais
pourquoi seulement le flou de Renoir ? Peut-être les sujets des
tableaux ont-ils plus d’importance que je ne veux bien leur
accorder.)
Dans
les deux cas, un unique réflexe (heureusement stoppé par les effets
d’une bonne éducation) : vomir.
Vomir,
j’imagine, est un réflexe de défense de l’organisme, qui se
débarrasse par le chemin le plus direct de ce qui le met en péril.
Nul doute qu’il y a, dans les peintures de Renoir, comme dans les
petits objets manufacturés, quelque chose qui me menace. (J’allais
écrire : « qui menace ma santé ». Ça n’aurait
pas de sens. J’ai vu suffisamment de tableaux de Renoir, j’ai
ramassé suffisamment de boutons pour savoir que ce n’est pas ma
santé physique qui est menacée.)
samedi 1 juin 2019
Petites nausées (3)
(Vers Petites nausées 1 et Petites nausées 2)
C’est
plutôt de l’écœurement. Fugitivement, face au bouton (surtout si
je suis obligé de m’en saisir), face à la peinture de Renoir, ce
qui me prend – sans toutefois aboutir –, c’est une envie de
vomir.
Rien
à voir avec le sujet du tableau ! Ce n’est pas dans ce qu’il
représente qu’il faut chercher la source de l’écœurement. Elle
est plutôt dans ce qui fait que l’on reconnaît que c’est un
« Renoir » (d’aucuns diraient la patte, la main, la
manière ; mais je ne crois pas que cela ait à voir avec les
mains).
Pourtant,
si j’y pense, pour le bouton ; contrairement au tableau, ce
qu’il représente compte. Si le bouton, arraché (ou neuf, non
encore cousu ; pour moi, cela revient au même) n’en était
pas un ; si c’était un objet véritablement tout autre ;
surtout, si c’était un produit de la nature : une graine, un
caillou auquel le hasard aurait donné l’apparence approximative
d’un bouton – dans ce cas alors je crois, j’ose penser qu’il
n’y aurait pas chez moi la moindre trace d’écœurement. Je
n’aurais pas besoin de lutter contre, comme je le fais depuis si
longtemps (au point que je suis devenu aujourd’hui en réalité
tout à fait capable – au prix d’un effort prolongé de ma
volonté – de mettre une chemise et d’aller visiter – je dirais
même d’apprécier – une exposition Renoir). Je n’y
penserais pas.
Bien
sûr je m’embrouille. Un bouton ne « représente » pas
au sens où un tableau « représente ». Là n’est pas
sa fonction.
Mais
c’est donc que, dans les deux cas, face au bouton, face au tableau
de Renoir, je suis tenté de penser à quelque chose (quelque chose à
quoi les autres, a priori, ne penseraient pas), que seule la volonté
m’a appris à occulter.
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